Conclusion
Rapport spécial sur le mandat de la Police fédérale de la Gendarmerie royale du Canada

211. Il y a cinq ans, le Comité a décidé d’étudier les activités des principaux organismes responsables de la sécurité et du renseignement qui n’avaient pas encore fait l’objet d’un examen particulier et indépendant. En plus d’améliorer ses connaissances sur ces organismes, le Comité cherchait, grâce à ses rapports, à renforcer la responsabilisation des ministres, à améliorer l’efficacité des organismes et à accroître la transparence en ce qui a trait aux activités peu explorées ou menées en secret. L’examen du mandat de la Police fédérale de la GRC réalisé par le Comité est une continuation de ce travail; même si la GRC avait fait l’objet d’un examen particulier et indépendant, son mandat en matière de Police fédérale, lui, y avait échappé.

212. Le mandat de la Police fédérale est unique. En effet, la Police fédérale est la seule organisation nationale au Canada responsable de faire appliquer toutes les lois fédérales et de mener des enquêtes sur les menaces criminelles les plus graves et les plus complexes qui pèsent sur les Canadiens et les intérêts du Canada. Son mandat est également étendu. La Police fédérale s’acquitte de ses responsabilités à l’échelle du Canada et à l’étranger, elle fournit des services au gouvernement fédéral dans un certain nombre de secteurs essentiels et elle travaille en collaboration avec des organismes fédéraux, provinciaux et territoriaux à l’atteinte d’objectifs communs.

213. La Police fédérale est aux prises avec un certain nombre de grandes difficultés qui minent sa capacité à remplir son rôle dans l’appareil de la sécurité nationale et du renseignement. Nous avons abordé ces difficultés dans notre examen, et nous les résumons ici. Le mandat de la Police fédérale subit les contrecoups du fait que la GRC privilégie de longue date la Police contractuelle, ce qui a façonné sa structure organisationnelle, sa gouvernance, ses finances, ses ressources humaines et ses modèles de formation. Dans ce contexte, la Police fédérale se heurte à des difficultés internes inhérentes à son programme. Parmi ces difficultés, mentionnons la faiblesse de la gouvernance et de l’établissement de la priorité des activités et des enquêtes fédérales; la qualité inadéquate des données et leur mauvaise gestion; le désalignement de la fonction du renseignement par rapport aux exigences fédérales; et l’inadéquation du modèle de recrutement et de formation de la Police fédérale par rapport à son mandat. Au cours des dernières années, la Police fédérale a entrepris des réformes dans le but de combler les lacunes dans la plupart de ces domaines; toutefois, la majorité de ces réformes ne font que commencer et pourraient facilement être anéanties par la tendance au statu quo, un penchant institutionnel commun à la plupart des organisations.

214. Le gouvernement doit jouer un rôle clair dans la stimulation du changement. Il devrait établir que la Police fédérale, une responsabilité exclusive du gouvernement fédéral, est prioritaire et qu’une réforme s’impose. Le ministre de la Sécurité publique devrait fournir une orientation claire et continue dans chacun des domaines où la Police fédérale a de la difficulté à réaliser son mandat et, pour ce faire, fixer des objectifs et des obligations en matière de production de rapports sur les résultats attendus. Si le gouvernement estime qu’il est nécessaire de préciser la question de l’indépendance de la police pour fournir une telle orientation, il devrait envisager de modifier la Loi sur la GRC. Le gouvernement devrait aussi mettre en place des mesures pour protéger les finances de la Police fédérale et en assurer une gouvernance efficace, et explorer les investissements supplémentaires qui pourraient être faits pour bâtir une organisation moderne et capable de répondre aux besoins. Enfin, le gouvernement devrait déterminer dans quelle mesure la Police fédérale bénéficie de l’effet de synergie administratif créé par son appartenance à une seule organisation et dans quelle mesure il faudrait peut-être séparer le mandat de la Police fédérale des responsabilités plus larges de la GRC.

215. Le gouvernement a la responsabilité de veiller à ce que les diverses composantes de son appareil de la sécurité nationale et du renseignement fonctionnent efficacement pour protéger les Canadiens et les intérêts du Canada. À la lumière de son examen, le Comité ne croit pas que l’efficacité, la flexibilité et la responsabilité dont fait preuve la Police fédérale suffisent pour protéger le Canada et les Canadiens contre les menaces les plus importantes en matière de sécurité nationale et de criminalité. Le gouvernement doit agir pour s’en assurer.