Chapitre 2 : Aperçu fonctionnel de l'appareil de la sécurité et du renseignement
Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement — Rapport annuel 2018

Qu'est-ce que la sécurité nationale et le renseignement?

45. Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement (le Comité) a le mandat d'examiner les questions liées à la sécurité nationale et au renseignement. Par contre, les termes « sécurité nationale » et « renseignement » ne sont pas définis dans la Loi sur le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement (Loi sur le CPSNR) qui établit le mandat du Comité, et ces termes ne sont définis dans aucune autre loi.

46. La définition officielle du terme sécurité nationale a changé au fil des ans. En 1979, la Commission McDonald a proposé une définition simple de la sécurité nationale : la nécessité de protéger le territoire canadien contre toute attaque et de préserver et de maintenir les mécanismes d'administration démocratiques Note de bas de page 1 . En 2004, le gouvernement a indiqué que la sécurité nationale avait trait aux menaces pouvant miner la sécurité de l'État ou de la société et ayant besoin d'une action concertée sur le plan national. Il mentionnait que la sécurité nationale était axée sur trois intérêts fondamentaux : protéger le Canada et les Canadiens, au pays et à l'étranger; s'assurer que le Canada n'est pas une source pour des menaces visant nos alliés; et contribuer à la sécurité internationale Note de bas de page 2 . À partir de cette vision relativement étroite de la sécurité, le gouvernement a adopté une perspective plus large. À titre d'exemple, un document de 2017 fourni au Comité a défini la sécurité nationale comme étant « la protection de la sécurité du territoire, du gouvernement, de l'économie et de la population du Canada ainsi que la promotion et la protection des intérêts canadiens Note de bas de page 3 . » Cette dernière définition est évidemment très large. Les questions de sécurité sont profondément intégrées à celles des affaires étrangères, au commerce, à l'économie, aux enjeux sociaux, à la santé et à l'environnement. Tel qu'il a été mentionné au paragraphe 33 du chapitre 1, le Comité a adopté une définition de travail de la sécurité nationale afin de l'aider à déterminer les activités ou questions à examiner.

47. Par contre, la définition du renseignement dispose d'une base juridique plus solide, mais elle souffre aussi d'une certaine ambiguïté. Le Comité note qu'il y a de nombreux types de renseignement. Dans la Loi sur la défense nationale, les « renseignements étrangers » sont définis comme suit :

Renseignements sur les moyens, les intentions ou les activités d'un étranger, d'un État étranger, d'une organisation étrangère ou d'un groupe terroriste étranger et qui portent sur les affaires internationales, la défense ou la sécurité.

Le renseignement de sécurité est un autre type de renseignement. Il n'est pas défini dans la loi, mais il a trait aux menaces envers la sécurité du Canada telles qu'elles sont définies dans la Loi sur le SCRS, notamment l'espionnage ou le sabotage, les activités influencées par l'étranger, le terrorisme et le renversement violent du gouvernement. Le Comité note l'existence d'autres types de renseignement, dont le renseignement de défense, le renseignement criminel et le renseignement financier. Il y a aussi de nombreux moyens de recueillir du renseignement, comme le recrutement de sources humaines d'information (appelé renseignement d'origine humaine), l'interception de communications (appelé renseignement électromagnétique ou sur les communications), et l'utilisation de sources d'information publiques (appelé renseignement de sources ouvertes). Tel qu'il a été mentionné au paragraphe 33 du chapitre 1, le Comité a adopté une définition de travail du renseignement afin de l'aider à déterminer les activités ou questions à examiner.

Quelles organisations font partie de l'appareil de la sécurité et du renseignement?

48. Un certain nombre d'organisations gouvernementales sont chargées d'assurer la sécurité des Canadiennes et des Canadiens et d'aider à la promotion des intérêts canadiens à l'étranger. L'appareil de la sécurité et du renseignement du Canada compte sept organisations fédérales principales dont les mandats sont entièrement ou en grande partie liés à la sécurité nationale, au renseignement ou à ces deux éléments. Le Comité en a ajouté un huitième, la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement (CSNR) auprès du premier ministre, en raison du rôle important que jouent cette conseillère et ses fonctionnaires dans la présentation de conseils au premier ministre et la coordination d'une grande partie de l'appareil de la sécurité et du renseignement (voir le Tableau 1). Neuf autres organisations font partie de l'appareil, mais elles ont des mandats et des activités qui vont au-delà de la sécurité ou du renseignement (consulter le Tableau 2). Ces organisations ont évolué au fil du temps en fonction des priorités du gouvernement, des changements législatifs ainsi que des nouveaux défis et des nouvelles menaces. Au cours de la dernière année, le Comité a visité chacun des principaux membres de l'appareil de la sécurité et du renseignement et a acquis une meilleure compréhension de leurs mandats, de leurs pouvoirs et de leurs activités. Il a aussi été informé sur le rôle des autres organisations.

49. L'Examen national des dépenses en renseignement 2016-2017 donne un aperçu de la taille et de la portée de l'appareil du renseignement au Canada. Ce rapport sur l'affectation des ressources des ministères et organismes fédéraux visant à appuyer les priorités du gouvernement du Canada en matière de renseignement fait état d'un budget d'environ *** et d'un effectif d'environ *** employés à temps plein répartis dans dix organisations Note de bas de page 4 . À titre de comparaison, en 2016-2017, les activités du renseignement de l'Australie se chiffraient à environ deux milliards de dollars canadiens et comptaient 7 000 employés dans dix organisations Note de bas de page 5 . Bien que l'Examen national des dépenses en renseignement au Canada n'indique pas les coûts totaux associés à toutes les activités de renseignement, les données fournissent une comparaison utile à un allié clé de taille et de portée semblables.

Principaux membres de l'appareil de la sécurité et du renseignement

Conseiller à la sécurité nationale et au renseignement

  • Conseille le premier ministre et le Cabinet
  • Coordonne les politiques et les activités de l'appareil de la sécurité et du renseignement
  • Fournit des évaluations du renseignement
  • Assume une fonction d'analyse critique de l'appareil de la sécurité et du renseignement

Centre de la sécurité des télécommunications

  • Recueille des renseignements sur les transmissions étrangères et en fait rapport
  • Protège l'information et les infrastructures d'information importantes du gouvernement du Canada
  • Aide les ministères

Service canadien du renseignement de sécurité

  • Recueille du renseignement et formule des conseils sur les menaces envers la sécurité du Canada
  • Prend des mesures pour réduire les menaces
  • Recueille le renseignement étranger au Canada
  • Effectue des évaluations de sécurité

Gendarmerie royale du Canada

  • Enquête sur les infractions liées à la sécurité nationale
  • Enquête sur le crime organisé complexe
  • Exécute les lois fédérales
  • Prend des mesures pour réduire les menaces
  • Effectue des évaluations des menaces

Ministère de la Défense nationale / Forces armées canadiennes

  • Mène le spectre complet des activités de renseignement en appui aux opérations militaires
  • Rassemble et évalue le renseignement

Affaires mondiales Canada

  • Gère la politique étrangère, y compris les questions de sécurité internationale
  • Gère les interventions d'urgence à l'étranger
  • Obtient de l'information privilégiée par l'intermédiaire du personnel affecté à l'étranger
  • Gère les relations du renseignement étranger

Agence des services frontaliers du Canada

  • Assure l'intégrité de la frontière aux points d'entrée
  • Utilise le renseignement et d'autres données en vue de prendre des décisions fondées sur le risque concernant l'admissibilité des personnes et des marchandises au Canada

Centre intégré d'évaluation du terrorisme

  • Analyse les menaces terroristes envers le Canada et les intérêts canadiens
  • Recommande le niveau national de la menace terroriste
  • Établit le niveau de menace terroriste envers les intérêts canadiens à l'étranger, y compris les événements spéciaux

Autres ministères et organismes qui contribuent à la sécurité nationale et au renseignement

  • Garde côtière canadienne
  • Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada
  • Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada
  • Innovation, Sciences et Développement économique Canada
  • Justice Canada
  • Ressources naturelles Canada
  • Agence de la santé publique du Canada
  • Sécurité publique Canada
  • Transports Canada

50. Les organisations de la sécurité et du renseignement ont chacune des responsabilités et des mandats précis, mais elles ont des objectifs communs (p. ex. assurer la sécurité des Canadiens) et travaillent de concert pour les atteindre. En bref, ils fonctionnent en tant qu'appareil; leur étendue et leur niveau de participation sont uniques au sein du gouvernement. La responsabilisation de chacun des ministères et organismes est exercée par le ministre responsable, mais les questions relatives à la sécurité nationale et au renseignement sont considérées depuis longtemps comme ayant une importance et une nature délicate exceptionnelles.

51. Le premier ministre et son Cabinet jouent donc un important rôle sur le plan de la direction et de la coordination pour l'ensemble de l'appareil. En date de la fin du mois d'août 2018, le comité responsable est le Comité du Cabinet chargé du Canada dans le monde et de la sécurité publique, lequel est présidé par la ministre de la Santé. De plus, le premier ministre a mis sur pied le Groupe d'intervention en cas d'incident (GRI). Celui-ci rassemble les ministres concernés et les hauts dirigeants ministériels pour coordonner l'intervention fédérale en cas de crise nationale ou d'incident à l'étranger qui ont des répercussions majeures pour le Canada. Avant août 2018, le premier ministre présidait le Comité du Cabinet chargé du renseignement et de la gestion des urgences, dont les membres se réunissaient pour se pencher sur les rapports et les priorités en matière de renseignement, pour coordonner et gérer les interventions en cas d'urgences publiques et d'incidents de sécurité nationale, et pour examiner l'état de la préparation canadienne. Dans le passé, d'autres comités permanents ou spéciaux ont assumé des fonctions semblables.

52. Le premier ministre est conseillé par la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement (CSNR), un haut fonctionnaire chargé d'assurer la coordination de l'appareil de la sécurité et du renseignement et d'y jouer un rôle pilote. La CSNR donne régulièrement de l'information et des conseils au premier ministre et à d'autres fonctionnaires sur des questions liées à la sécurité nationale et au renseignement, notamment lorsqu'il est question d'obtenir l'approbation du premier ministre pour mener des activités de nature particulièrement délicate.

53. La CSNR relève du greffier du Conseil privé et elle est responsable de trois organisations au sein du Bureau du Conseil privé, à savoir le Secrétariat de la politique étrangère et de la défense, le Secrétariat de la sécurité et du renseignement et le Secrétariat de l'évaluation du renseignement. Ces secrétariats aident à la coordination des activités opérationnelles, stratégiques et d'évaluation de l'appareil dans les domaines des affaires étrangères, de la défense, de la sécurité et du renseignement. La CSNR préside deux comités de sous-ministres, un sur les opérations (rencontre hebdomadaire) et un autre sur l'évaluation du renseignement (rencontre mensuelle). La CSNR assure avec le sous-ministre de la Sécurité publique la présidence d'une réunion mensuelle de sous-ministres portant sur la sécurité nationale. Ces comités reçoivent le soutien de fonctionnaires de l'ensemble de l'appareil. La CSNR dirige également des réunions spéciales de fonctionnaires afin de gérer des crises ou des événements importants. Le bureau du CSNR n'a pas de statut juridique, mais il s'appuie sur les pouvoirs découlant du poste de conseillère au Bureau du Conseil privé et de conseillère principale du premier ministre. Coordonné par la CSNR, le processus biennal visant à déterminer, à approuver et à mettre en œuvre les priorités en matière de renseignement est un important mécanisme servant à régir l'appareil et à assurer la responsabilisation à l'égard des ministres et du Cabinet. Cette question est abordée plus en détail au chapitre 3.

54. Sécurité publique Canada joue un rôle de coordination et de direction en matière de sécurité nationale. Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile est responsable de trois principaux membres de l'appareil de la sécurité et du renseignement : le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC). Le ministre reçoit régulièrement de l'information sur les activités de ces organisations et approuve un certain nombre de leurs opérations. Le ministère dirige, coordonne ou soutient plusieurs processus de sécurité, notamment l'inscription des entités terroristes, l'inscription des personnes au Programme de protection des passagers et l'exécution des examens de la sécurité nationale relatifs à des investissements étrangers. Sur le plan de la cybersécurité, le ministère travaille en collaboration avec d'autres ministères et le secteur privé en vue d'atténuer les cybermenaces envers les infrastructures essentielles (comme le système financier) et de promouvoir la cybersécurité auprès des Canadiens. Le sous-ministre de la Sécurité publique dirige un comité de sous-ministres sur les questions de cybersécurité, lequel est convoqué au besoin pour discuter des cybermenaces, des opérations et des questions stratégiques.

55. Le travail de ces organismes est essentiel. Chaque jour, des représentants du gouvernement partout au pays et dans le monde (agents du renseignement, enquêteurs de police, diplomates, soldats et agents des services frontaliers, pour ne nommer que ceux-là) s'affairent à protéger les Canadiennes et les Canadiens et à servir les intérêts canadiens dans des domaines tels que le commerce et les relations internationales. Certaines de ces organisations se servent de méthodes sophistiquées et secrètes pour mener leurs activités et elles sont assujetties à un niveau élevé de surveillance et d'examen, notamment par l'entremise des tribunaux, des approbations ministérielles et des organismes d'examen indépendants.

56. Le Comité est d'avis que ce travail n'est pas bien compris. Les Canadiennes et Canadiens ne semblent pas bien comprendre quels sont le mandat et les activités de chaque organisation faisant partie de l'appareil de la sécurité et du renseignement, la manière dont elles collaborent ou le rôle de leurs organismes d'examen. À titre d'exemple, selon une récente recherche sur l'opinion publique, seulement trois pour cent des répondants pouvaient identifier correctement le Centre de la sécurité des télécommunications (CST) sans aide, et seulement 37 pour cent d'entre eux ont indiqué qu'ils avaient déjà entendu parler de l'organisation Note de bas de page 6 . Selon d'autres recherches, seulement trois Canadiens sur dix peuvent identifier le SCRS Note de bas de page 7 . Une recherche sur l'opinion publique du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes (MDN/FAC) indique que seulement  6 pour cent des Canadiens avaient connaissance des activités militaires menées au cours de la dernière année et demie Note de bas de page 8 . Et ce, même si de l'information sur ces organisations sont disponibles publiquement. Chaque organisme possède un site Web public donnant de l'information sur son rôle et ses pouvoirs (le CST est particulièrement efficace à cet égard), et le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité et le commissaire du CST ont tous les deux publié des rapports annuels détaillés sur leurs examens du travail des deux organisations clés que sont le SCRS et le CST . Il existe aussi une panoplie de ressources universitaires et en ligne pour informer les Canadiens. Le Comité est d'avis que les Canadiens seraient bien servis si l'information gouvernementale était plus facile à consulter. De manière plus précise, il croit qu'il serait avantageux que le public ait de l'information qui explique les activités de sécurité et du renseignement ainsi que le rôle que jouent les organisations, de manière individuelle et collaborative, pour protéger les Canadiennes et les Canadiens et servir les intérêts canadiens. Cette information devrait être regroupée en vue d'en faciliter la consultation et normalisée afin de s'assurer qu'elle est complète.

57. Il semble y avoir un manque de connaissances semblable au sujet des menaces envers la sécurité nationale du Canada. Dans l'état actuel des choses, un Canadien intéressé par la question devrait consulter de nombreux sites du gouvernement afin de comprendre quelles sont les plus grandes menaces pour le Canada. Dans le cas de certaines menaces, comme le terrorisme, l'information est facile à obtenir et mise à jour régulièrement (p. ex. le Rapport public sur la menace terroriste pour le Canada publié chaque année). Dans le cas d'autres menaces, comme le crime organisé ou l'ingérence dans la politique intérieure du Canada, l'information est souvent limitée, éparpillée dans différentes sources ou incomplète. Le Comité est d'avis que les Canadiennes et les Canadiens seraient également bien servis si davantage de renseignements sur les menaces étaient faciles d'accès.

Assurer la sécurité des Canadiennes et des Canadiens

58. La section qui suit donne un aperçu fonctionnel de haut niveau de l'appareil de la sécurité et du renseignement du Canada. Elle ne présente pas en détail le mandat, les pouvoirs et les activités de tous les membres de l'appareil. À une exception près (le MDF/FAC, décrit au chapitre 4), le Comité n'a pas procédé à des examens approfondis sur ces membres afin de pouvoir parler en toute connaissance de cause de l'un ou de l'autre, ou de l'appareil dans son ensemble. Cette section ne traite pas non plus des lacunes susmentionnées; le Comité est d'avis qu'il incombe aux ministres responsables des ministères en question de mieux informer la population canadienne sur l'éventail de menaces auxquelles le Canada fait face et sur le rôle que jouent certaines organisations pour les contrer. Cette section porte plutôt sur ce que le Comité a appris dans le cadre de ses interactions avec l'appareil de la sécurité et du renseignement depuis sa création.

59. Le gouvernement affirme que sa grande priorité consiste à assurer la sécurité des Canadiennes et des Canadiens, au pays et à l'étranger. Pour ce faire, dans un contexte de sécurité nationale, il faut un éventail d'activités pour déceler, prévenir et contrer les menaces envers la sécurité du Canada. Les membres clés de l'appareil de la sécurité et du renseignement ont donné au Comité un aperçu des plus grandes menaces envers la sécurité nationale. L'aperçu fonctionnel qui suit est fondé sur les séances d'information et les données de sources ouvertes fournies au Comité sur ces enjeux.

Terrorisme

60. Le Bureau du Conseil privé a mentionné un certain nombre de menaces envers la sécurité nationale du Canada au Comité. Le premier étant le terrorisme. Au fil des ans, il y a eu de nombreuses menaces terroristes envers le Canada et ses alliés. Les menaces terroristes qui guettent le Canada sont maintenant présentées dans le Rapport public de 2017 sur la menace terroriste pour le Canada Note de bas de page 9 . Le rapport indique que les extrémistes violents motivés par Al-Qaïda et Daech représentent toujours la principale menace pour le Canada, et que ces groupes sont en mesure de communiquer facilement en se servant des médias sociaux et des technologies de chiffrement. Selon le Centre intégré d'évaluation du terrorisme, le niveau national de la menace terroriste est présentement modéré, ce qui signifie qu'un attentat terroriste violent pourrait survenir et que des mesures supplémentaires sont en place pour assurer la sécurité des Canadiens Note de bas de page 10 . Ce niveau de menace a été fixé après la diffusion en 2014 d'un message de Daech encourageant les attentats au Canada. Les attentats terroristes survenus en octobre 2014 à St-Jean-sur-Richelieu et au centre-ville d'Ottawa se sont produits peu après, et le niveau de menace est demeuré le même depuis. Le Centre intégré d'évaluation du terrorisme attribue différents niveaux de menace à chaque grande municipalité du Canada ainsi qu'à différents modes de transport (comme le transport par train ou les services aériens commerciaux); ***. Les évaluations de la menace terroriste donnent aux représentants du gouvernement et aux organismes d'application de la loi des précisions sur les risques et les vulnérabilités en vue d'orienter les stratégies d'atténuation et les positions en matière de sécurité.

61. Le SCRS et la GRC sont les principales organisations responsables des enquêtes sur les menaces terroristes ainsi que de la prévention et de la perturbation de celles-ci. À titre d'organisation de renseignement, le SCRS recueille et analyse l'information en vue de conseiller le gouvernement sur les menaces à la sécurité du Canada, alors que la GRC recueille des éléments de preuve pouvant être utilisés dans des procédures judiciaires. Le SCRS peut ouvrir une enquête lorsqu'il soupçonne qu'une conduite pourrait menacer la sécurité nationale. Par contre, la GRC, à titre d'organisme d'application de la loi, doit avoir des motifs raisonnables de croire qu'un crime sera ou a été commis si elle veut porter des accusations criminelles. Au fur et à mesure que le SCRS obtient plus de renseignement, il peut utiliser des méthodes d'enquête de plus en plus intrusives, y compris demander un mandat à la Cour fédérale pour intercepter les communications téléphoniques ou Internet d'une cible. Si le comportement d'un sujet d'enquête atteint un certain seuil de criminalité, le SCRS avisera la GRC, qui peut ouvrir une enquête criminelle. Lorsque la GRC mène une enquête, elle doit être en mesure de le divulguer l'information recueillie en cour. La GRC peut aussi chercher à obtenir un mandat de la cour pour intercepter les communications d'un suspect ou utiliser d'autres méthodes de surveillance intrusives, comme la fouille des biens ou l'installation d'un dispositif de localisation sur des véhicules. Dans certains cas, le SCRS et la GRC peuvent mener des enquêtes en parallèle afin de recueillir les éléments de renseignement ou de preuve qui correspondent à leurs mandats respectifs. Cette coordination et coopération sont régies par les modalités de l'entente Une vision conclue entre le SCRS et la GRC, laquelle fait en sorte que les organismes adoptent une approche collaborative en matière de gestion des menaces.

62. Dans d'autres cas, la GRC peut enquêter seule sur des menaces possibles, ou en coordination avec les services de police provinciaux ou municipaux, ou un partenaire international, comme le Federal Bureau of Investigation (FBI) des États-Unis. Une telle situation s'est produite en août 2016, lorsque le FBI a fourni à la GRC de l'information qui a permis à la Gendarmerie d'identifier et de localiser Aaron Driver, un sympathisant de Daech qui planifiait un attentat à la gare Union, à Toronto. La GRC a travaillé en collaboration avec les services de police locaux pour empêcher M. Driver de mettre à exécution l'attentat, et le suspect a été tué par balle lors d'un affrontement avec la police.

63. Certaines organisations de sécurité et de renseignement peuvent prendre de nombreuses mesures pour prévenir et contrer des complots terroristes. Les enquêtes policières visent principalement à porter des accusations et à entamer des poursuites. Par contre, les enquêtes ne se rendent pas toutes à cette étape, et la police peut décider de prendre d'autres mesures afin de réduire les risques de comportement criminel violent, comme chercher à obtenir un engagement de ne pas troubler la paix pour empêcher une personne d'adopter certains comportements. Le SCRS et la GRC peuvent travailler en collaboration avec Sécurité publique Canada en vue d'inscrire le nom d'une personne sur la liste du Programme de protection des passagers. Le SCRS peut aussi prendre des mesures pour réduire les menaces, comme informer des parents que leur enfant consulte du contenu extrémiste en ligne. De son côté, l’ASFC peut inspecter les marchandises d'une personne à son entrée au Canada, refuser l'entrée d'un non-citoyen s'il est considéré comme représentant un risque pour la sécurité, et veiller à ce que les personnes présentant un risque élevé soient signalées aux organismes pertinents (comme la GRC ou le SCRS).

64. Sécurité publique Canada contribue à la direction et à la coordination de la lutte contre le terrorisme. Ce ministère est responsable de la Stratégie antiterroriste du Canada. La Stratégie comporte quatre éléments (empêcher, déceler, priver et intervenir), et a comme objectif principal de lutter contre le terrorisme à l'échelle nationale et internationale en vue de protéger le Canada, les Canadiens et les intérêts canadiens Note de bas de page 11 . Sécurité publique Canada assume aussi le même rôle dans la lutte contre la radicalisation menant à la violence, notamment par l'établissement du Centre canadien d'engagement communautaire et de prévention de la violence Note de bas de page 12 .

65. Les enquêtes relatives au terrorisme exigent beaucoup de ressources et elles sont complexes et longues. Le SCRS et la GRC consacrent énormément de ressources pour enquêter sur les menaces terroristes. En 2015, le commissaire de la GRC a déclaré au Parlement que la GRC avait réaffecté des centaines d'agents fédéraux qui enquêtaient sur le crime organisé à des enquêtes sur le terrorisme. Le Comité a appris que l'importance prééminente accordée par le SCRS et la GRC au terrorisme fait en sorte que, en comparaison, moins de ressources sont consacrées à d'autres menaces, telles que les activités du crime organisé, d'espionnage et d'influence étrangère.

Espionnage et influence étrangère

66. L'espionnage et l'influence étrangère représentent la deuxième menace à la sécurité nationale mentionnée par le Bureau du Conseil privé au Comité. Les activités d'espionnage mettent principalement en cause des États étrangers qui tentent d'obtenir des renseignements politiques, économiques et militaires, ou des renseignements commerciaux de nature exclusive, par des moyens clandestins. Les activités d'influence ou d'ingérence étrangère sont menées par des États étrangers qui se servent de méthodes clandestines ou trompeuses en vue d'influencer ou manipuler des communautés d'immigrants, des partis politiques et des fonctionnaires au Canada.

67. La Russie et la Chine sont *** parmi les quelques États qui mènent des activités d'espionnage et d'influence étrangère au Canada. La Russie a envoyé à maintes reprises des agents du renseignement au Canada pour y établir de fausses identités et se livrer à de l'espionnage. Au nombre des exemples, on compte le couple russe d'Ian et Laurie Lambert, dont les activités d'espionnage à Toronto ont été découvertes par le SCRS en 1996 et qui a été expulsé du pays; un Russe du nom de Paul William Hampel, qui a été arrêté à Montréal alors qu'il tentait de quitter le Canada en 2006; et le couple russe composé de Tracey Foley et de Don Heathfield, qui ont vécu à Montréal et à Toronto sous de fausses identités canadiennes et qui ont été arrêtés aux États-Unis en 2010 et renvoyés en Russie. En janvier 2012, Jeffrey Delisle, un officier de la Marine royale canadienne, a été arrêté pour avoir fourni des renseignements à la Russie. Il a été déclaré coupable et condamné en 2013. En mars 2018, le Canada a expulsé quatre diplomates russes dans le cadre d'un effort concerté à l'échelle mondiale visant à punir la Russie pour l'empoisonnement de deux personnes au Royaume-Uni, en indiquant que les diplomates en question avaient été identifiés comme étant des agents du renseignement ou des personnes qui ont utilisé leur statut diplomatique pour compromettre la sécurité et la démocratie du Canada Note de bas de page 13 .

68. La Chine est reconnue à l'échelle mondiale pour les efforts qu'elle déploie pour influencer les communautés chinoises et la politique d'autres pays Note de bas de page 14 . Le gouvernement chinois compte un certain nombre d'organismes officiels qui tentent d'influencer les communautés chinoises et les politiciens afin qu'ils adoptent des positions favorables à la Chine, dont le ministère du Front commun. Le directeur du SCRS a soulevé des préoccupations au sujet des activités d'influence de la Chine visant les politiciens canadiens en 2010, et un ancien conseiller canadien en matière de politique étrangère et de défense auprès du premier ministre, puis ambassadeur canadien en Chine, a déclaré en 2017 que la Chine se sert des groupes de la diaspora et mobilise des étudiants chinois pour influencer la politique canadienne Note de bas de page 15 . En 2016, des préoccupations ont été soulevées au sujet de riches hommes d'affaires chinois ayant des liens étroits avec le Parti communiste de Chine qui versent des contributions politiques au Canada Note de bas de page 16 . Des questions semblables ont été soulevées dans des pays où les populations de la diaspora chinoise sont importantes. Des rapports de médias et d'universitaires mentionnent les efforts déployés par la Chine en Australie et en Nouvelle-Zélande pour influencer les politiques gouvernementales, notamment à l'aide d'importantes contributions politiques, en appuyant secrètement des groupes communautaires et des manifestations et en influençant les médias de langue chinoise Note de bas de page 17 . Des policiers et des responsables de la sécurité chinois ont aussi été surpris en train de mener sans permission des activités dans des États étrangers pour persuader ou forcer des fugitifs chinois à retourner en Chine Note de bas de page 18 . ***

69. Tout comme leur rôle dans le domaine du terrorisme, le SCRS et la GRC sont les principales organisations responsables des enquêtes liées à l'espionnage et à l'influence étrangère et de la lutte à ces activités. À l'instar d'autres enquêtes sur les menaces à la sécurité du Canada, le SCRS peut prendre diverses mesures pour enquêter sur les activités d'espionnage et d'influence étrangère au Canada et réduire la menace concernant celles-ci. La GRC peut mener une enquête criminelle, comme elle l'a fait dans le cas d'espionnage de Jeffrey Delisle. Affaires mondiales Canada peut être mis à contribution si on établit que des diplomates étrangers mènent de telles activités et doivent quitter le pays, comme cela s'est produit à maintes reprises avec des diplomates de la Russie et d'autres pays Note de bas de page 19 . Les représentants du SCRS ont mentionné au Comité que la menace d'espionnage et d'influence étrangère s'intensifiait au Canada et qu'elle nécessiterait probablement une intervention plus importante au cours des années à venir. Le Comité est du même avis et note que l'Australie a adopté une loi en juin 2018 afin de mieux prévenir et perturber l'ingérence étrangère et faire enquête sur celle-ci.

Cybermenaces

70. Les cybermenaces représentent une autre menace importante à la sécurité nationale mentionnée au Comité. Dans une étude de 2017, le CST indique que « les États-nations déploient constamment des cybercapacités pour tenter d'accéder aux réseaux du gouvernement du Canada et aux communications des représentants du gouvernement fédéral Note de bas de page 20 . » La Russie et la Chine font partie des acteurs étatiques les plus actifs. Les cybermenaces russes ont attiré l'attention du public lors des élections présidentielles américaines de 2016, lorsque des organismes du renseignement russes ont subtilisé des données de la campagne de la candidate du Parti démocratique Hillary Clinton, les ont transmises par l'intermédiaire de différents sites Web, et se sont servi de diverses méthodes, dont de faux comptes sur les médias sociaux, pour diffuser de la propagande et de la désinformation et pour intensifier les tensions sociales aux États-Unis. Les efforts russes déployés afin d'influencer les processus démocratiques en Europe et en Afrique ont transpiré par la suite. En 2014, un acteur parrainé par la Chine a infiltré les réseaux informatiques du Conseil national de recherches du Canada, ce qui a entraîné d'importants coûts de nettoyage et de redressement. Le Canada et d'autres pays, dont les États-Unis et le Royaume-Uni, ont négocié des accords avec la Chine en vue de réduire certaines activités de cyberespionnage chinoises.

71. Le CST est la principale organisation responsable de la protection des réseaux du gouvernement du Canada contre les cyberintrusions sophistiquées. Il utilise des outils à la fine pointe de la technologie pour protéger les réseaux du gouvernement contre les acteurs malveillants qui tentent d'accéder à ces réseaux et de les infiltrer. Le CST adapte régulièrement ses outils en fonction des nouvelles technologies et tactiques utilisées par ces acteurs ainsi que du renseignement obtenu dans le cadre de ses activités de collecte et de celles de ses alliés. Il travaille en collaboration avec Services partagés Canada afin de sécuriser les réseaux du gouvernement, et avec Sécurité publique Canada pour aider à protéger les systèmes d'information d'autres ordres de gouvernement, des fournisseurs d'infrastructures essentielles et du secteur privé. Le 12 juin 2018, le gouvernement fédéral a annoncé le regroupement des groupes opérationnels de cybersécurité dans le Centre canadien pour la cybersécurité, dirigé par le CST . Ce regroupement comprend le Centre canadien de réponse aux incidents cybernétiques, en activité à Sécurité publique Canada depuis février 2005.

Crime organisé d'envergure

72. Le crime organisé d'envergure est une autre menace importante mentionnée par le Bureau du Conseil privé au Comité. Le crime organisé est de plus en plus sophistiqué et de nature mondiale. Il se trouve dans les secteurs traditionnels de la criminalité, comme le trafic de stupéfiants, la prostitution et la traite de personnes, et dans des formes plus complexes de la criminalité en « col blanc », comme le blanchiment d'argent, la manipulation des marchés et le vol d'identité. Les répercussions du crime organisé sont énormes et insidieuses; le crime organisé compromet la sécurité publique, corrompt nos systèmes juridiques et politiques, et menace l'intégrité de notre économie et de nos systèmes financiers.

73. LA GRC est l'organisation responsable des enquêtes sur le crime organisé d'envergure et de la lutte contre celui-ci. Le Programme de la police fédérale de la GRC compte environ 5 000 enquêteurs et plus de 1 000 employés spécialisés pour mener des enquêtes dans un large éventail de domaines. Les enquêteurs se servent de divers outils pour effectuer leur travail et peuvent demander des mandats aux tribunaux afin de pouvoir utiliser les méthodes les plus intrusives, notamment l'interception des communications personnelles. La GRC travaille de concert avec d'autres organisations fédérales, dont l’ASFC qui est chargée de l'exécution des lois relatives à l'immigration, aux douanes et au contrôle des exportations stratégiques, et le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (mieux connu sous le nom de CANAFE) qui est chargé de l'analyse des déclarations financières et de la communication à la GRC (et au SCRS) d'éléments du renseignement financier qui pourraient aider aux enquêtes sur le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. La GRC collabore aussi avec les services de police canadiens et des partenaires internationaux, notamment par l'intermédiaire du groupe sur l'application de la loi du Groupe des cinq et d'Interpol, pour enquêter sur des crimes de portée internationale.

Armes de destruction massive

74. La prolifération et l'utilisation potentielle des armes de destruction massive constituent une autre menace à la sécurité nationale signalée au Comité. Il est question d'armes nucléaires, chimiques, radiologiques ou biologiques qui pourraient causer une destruction généralisée et aveugle. [*** Le texte cite une évaluation et nomme un pays qui représente une menace grandissante. ***] L'appareil se préoccupe aussi des États étrangers qui tentent d'obtenir des technologies civiles, comme des logiciels de chiffrement des télécommunications ou de l'équipement laser sophistiqué (technologies à double usage), et des systèmes de diffusion assujettis à des listes de contrôle ou à des sanctions, qui pourraient servir à l'élaboration de technologies militaires pour menacer le Canada et ses alliés.

75. Les membres de l'appareil de la sécurité et du renseignement travaillent en collaboration pour contrer la menace de prolifération. À titre d'exemple, Affaires mondiales Canada est chargé de l'administration d'un certain nombre de lois visant à empêcher la prolifération des armes de destruction massive ou l'exportation des technologies à double usage. Il incombe à Innovation, Sciences et Développement économique Canada d'examiner les investissements qui pourraient porter atteinte à la sécurité nationale en vertu de la Loi sur Investissement Canada. Dans chaque cas, les ministères comptent sur l'expertise et le renseignement d'organismes tels que le SCRS, le CST , le MDN, la GRC, et Sécurité publique Canada pour conseiller les ministres ou prendre des décisions concernant des demandes d'exportation précises. La GRC peut aussi mener des enquêtes sur des personnes ou des entreprises soupçonnées de contrevenir aux lois canadiennes dans ce domaine.

Promouvoir les intérêts canadiens

76. Outre le fait de contrer les menaces à la sécurité, le renseignement est utilisé pour servir les intérêts canadiens dans les domaines des relations internationales, de la défense nationale et de la sécurité nationale. Le Canada est un acteur actif sur la scène internationale. Il accorde une grande attention à l'établissement et au maintien de relations bilatérales avec des pays se trouvant dans des régions clés. Il joue un rôle important dans de nombreuses organisations multilatérales axées sur des questions comme le commerce et la sécurité. Il déploie du personnel partout dans le monde en appui de la politique étrangère et des priorités en matière de sécurité du Canada, notamment pour des missions militaires et de maintien de la paix, des projets humanitaires et d'aide, ou des situations de crise où des Canadiens ont besoin de soutien à l'étranger. Dans chacune de ces circonstances, le gouvernement et ses représentants se servent du renseignement en vue de mieux comprendre la situation, d'élaborer les politiques les plus adéquates ou avantageuses, et de maximiser l'efficacité de ses activités.

77. Plusieurs organisations recueillent et évaluent du renseignement pour appuyer ces intérêts. Le CST recueille du renseignement étranger en fonction des priorités du gouvernement dans ce domaine. Le SCRS peut, à la demande du ministre de la Défense ou de la ministre des Affaires étrangères, recueillir du renseignement au Canada qui a trait à la défense ou aux affaires internationales. Il peut aussi faire état du renseignement obtenu dans le cadre d'une enquête de sécurité. Les rapports de renseignement du CST et du SCRS sont rédigés par le personnel de chaque organisme et transmis aux fonctionnaires spécialement autorisés ayant un besoin de savoir dans plus de 20 ministères et aux ministres concernés à l'aide d'un réseau de communication hautement classifié ou par l'intermédiaire des agents des relations avec les clients. Affaires mondiales Canada obtient de l'information privilégiée par ses employés en poste à l'étranger et distribue ses rapports à l'aide d'un réseau classifié. Pour sa part, le MDN/FAC utilisent leurs capacités de renseignement pour appuyer les forces déployées à l'étranger (cette question est abordée plus en détail au chapitre 4).

78. Un certain nombre d'organisations rédigent des évaluations du renseignement destinées à un large éventail de fonctionnaires, dont des hauts fonctionnaires et des ministres. Une évaluation fait habituellement appel à de nombreuses sources d'information et de renseignement, y compris des reportages dans les médias, de la recherche universitaire, des relations privilégiées, des métadonnées ou de l'information hautement classifiée obtenues de sources humaines ou de communications interceptées. Les décideurs et les ministères opérationnels peuvent utiliser ces évaluations en guise d'information contextuelle pour appuyer des délibérations stratégiques ou perfectionner ou changer des programmes opérationnels. Le Secrétariat de l'évaluation du renseignement du Bureau du Conseil privé élabore des évaluations stratégiques de grandes questions internationales. Les évaluations de la menace que présente le terrorisme pour le Canada sont effectuées par le Centre intégré de l'évaluation du terrorisme. Le SCRS élabore et distribue des évaluations sur les menaces à la sécurité du Canada. Le CST effectue des évaluations sur les cybermenaces et la cybersécurité, pour ce qui est des systèmes du gouvernement fédéral et des infrastructures d'information importantes pour le gouvernement du Canada. Affaires mondiales Canada fait des évaluations sur les menaces pour les missions diplomatiques. Le MDN/FAC effectuent une panoplie d'évaluations sur des questions militaires, des évaluations tactiques (en soutien aux opérations déployées) à des évaluations stratégiques (en soutien à la prise de décisions concernant les déploiements militaires).

Conclusion

79. De nombreux ministères et organismes composent l'appareil de la sécurité et du renseignement du Canada. Ces organisations ont divers mandats et diverses responsabilités, mais elles travaillent de concert pour assurer la sécurité des Canadiens et servir les intérêts canadiens. La gouvernance et la coopération de ces organisations sont régies à l'aide de comités précis qui se réunissent régulièrement pour discuter des questions opérationnelles et stratégiques d'intérêt commun. De plus, ces organisations coopèrent et s'échangent de l'information à divers degrés, en fonction du recoupement de leurs pouvoirs opérationnels et de leurs mandats. Les deux prochains chapitres porteront sur la manière dont le gouvernement du Canada établit et met en œuvre les priorités en matière de renseignement, un mécanisme important pour la gouvernance et la responsabilisation de l'appareil de la sécurité et du renseignement du Canada, et examineront les activités et les pouvoirs relatifs au renseignement du MDF/FAC, un des principaux membres de l'appareil de la sécurité et du renseignement. Le Comité espère que l'ensemble de cette information aidera non seulement à améliorer l'efficacité et la responsabilisation de l'appareil de la sécurité et du renseignement du Canada, mais aidera aussi les Canadiens à mieux comprendre les fonctions de l'appareil et les activités précises de certains de ses principaux membres.