Chapitre 5 : Observations sur la première année du Comité et sur l'avenir
Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement — Rapport annuel 2018

261. La première année du Comité a été marquée par l'apprentissage et l'adaptation du Comité, de son Secrétariat et de l'appareil de la sécurité et du renseignement.

262. Les membres de l'appareil de la sécurité et du renseignement ont offert un soutien au Comité tout au long de sa première année. Le Centre de la sécurité des télécommunications (CST) et le Service canadien de renseignement de sécurité (SCRS) ont mis à profit leur longue expérience de travail avec des organismes d'examen pour aider d'autres organisations à se préparer en vue des examens du Comité. Les représentants de l'appareil ont généreusement offert leur temps et ont volontiers fait profiter le Comité de leur expérience. Ils ont exprimé à maintes reprises leur soutien envers le mandat du Comité lors de visites sur place, de séances d'information et d'audiences devant le Comité. Un certain nombre d'organisations ont également désigné du personnel ou créé des unités spécialisées pour répondre aux attentes accrues d'examen (le ministère de la Défense nationale a été remarquable à cet égard), ce qui sera important si le projet de loi C-59 reçoit la sanction royale et si l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement est créé. Pour sa part, le Bureau du Conseil privé a appuyé le Comité et son Secrétariat afin de mettre en place l'infrastructure administrative et physique ainsi que l'infrastructure d'information qui sont requises pour accomplir le travail. Il a joué un rôle de coordination et de liaison au nom de l'appareil, dirigé la coordination des séances d'information de l'appareil à l'intention du Comité et répondu à ses demandes d'information.

263. Le calendrier du Comité a imposé une pression sur l'appareil de la sécurité et du renseignement. Le Comité n'a commencé ses réunions qu'en décembre 2017 et son Secrétariat n'a été doté au complet qu'en août 2018. Avant de pouvoir déterminer les examens à mener au cours de sa première année, le Comité devait d'abord en apprendre davantage sur les nombreuses organisations jouant un rôle dans les domaines complexes de la sécurité et du renseignement. Comme nous l'avons mentionné au chapitre 1, il a visité un certain nombre d'organisation clés de l'appareil de la sécurité et du renseignement et a reçu de l'information sur les menaces à la sécurité nationale et les défis que le Canada doit relever. En avril 2018, il a délibéré sur l'éventail d'examens qu'il pourrait effectuer et en a retenu deux, qui sont décrits dans le présent rapport. Il a également décidé de procéder à un examen spécial des diverses allégations entourant le voyage du premier ministre en Inde en février 2018. Dans chaque cas, le Comité a imposé un échéancier serré aux ministères et organismes pour l'obtention de l'information et la tenue d'audiences afin de s'assurer que le Comité pourrait présenter son rapport spécial et son rapport annuel au premier ministre, conformément aux exigences de la Loi sur le CPSNR.

264. Le Comité reconnaît que les circonstances n'étaient pas idéales. À l'avenir, le Comité a l'intention d'adopter une approche plus mesurée pour mener ses examens. Sans compromettre son indépendance ou la portée de son travail, il s'emploiera à mobiliser les membres de l'appareil plus tôt afin de mieux définir la portée des examens et de déterminer l'information qui sera requise; de fixer des délais raisonnables pour la prestation de documents, la mobilisation au niveau opérationnel et la préparation en vue des audiences devant le Comité; et de travailler plus tôt avec les représentants afin de déterminer la portée des changements qui doivent être apportés aux rapports du Comité dans le but de protéger l'information qui ne devrait pas être rendue publique. Ces étapes ne pourront pas toujours être respectées, comme l'a appris le Comité au début de son mandat, un examen spécial peut survenir de façon inopinée et nécessiter un échéancier plus court ou comporter des exigences uniques en ce qui a trait à l'information. Cependant, lorsque les étapes seront possibles, elles devraient contribuer à renforcer les examens du Comité.

265. En même temps, le Comité a relevé un certain nombre de défis qu'il surveillera au fil du temps. L'un de ces défis porte sur la prestation de l'information. Malgré l'appui sans équivoque, et que le Comité croit sincère, des chefs de file de l'appareil de la sécurité et du renseignement envers le mandat du Comité, plusieurs organisations ont interprété de façon étroite les demandes d'information du Comité. Le Comité a dû à maintes reprises demander à des organisations de fournir de plus amples renseignements, y compris la correspondance par courriel pertinente, afin de s'assurer que l'information transmise était exhaustive et d'inciter les représentants à répondre à des questions de base.

266. Le Comité ne peut passer sous silence les défis auxquels il a lui-même été confronté. Malheureusement, le Comité a perdu l'un des siens, le député Gordon Brown, qui est décédé prématurément en mai 2018. Le décès de Gord nous a privés d'une voix sage et réfléchie sur les enjeux d'importance pour les parlementaires et les Canadiens. Son absence s'est fait sentir au cours de l'été et de l'automne lors des délibérations du Comité sur ses deux principaux examens. La situation s'est aggravée lors de la démission de l'honorable Tony Clement, le 7 novembre, privant le Comité d'un représentant de !'Opposition officielle de la Chambre des communes. Même si la majorité du travail du Comité était terminé au début de novembre, ces événements mettent en relief l'importance de remplacer rapidement les membres qui quittent le Comité, peu importe la raison de leur départ. Ces événements ont incité le Comité à reconfirmer sa propre discipline sur la manipulation adéquate de renseignements de nature délicate et classifiés et sur le respect de mesures de sécurité personnelle, y compris la participation à des séances d'information additionnelles, en novembre, des fonctionnaires de la sécurité et du renseignement dans ces domaines.

Travaux à venir

267. En plus du rapport spécial prévu annoncé dans le chapitre précédent, le Comité a déjà entrepris ses travaux d'examen en vue de son rapport annuel 2019. Le Comité estime qu'il est important d'aborder une lacune importante dans l'appareil de sécurité et de renseignement du Canada, par l'examen des organisations qui n'ont pas fait l'objet d'un examen précédemment (outre le CST, le SCRS et la GRC). Son examen en 2018 des activités du renseignement de défense du MDN/FAC constituait une première étape en ce sens. En 2019, le Comité va examiner les activités de sécurité nationale et de renseignement de I'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC). Cet examen visera à comprendre le rôle que joue l’ASFC dans l'appareil de sécurité et de renseignement du Canada, à décrire les activités de sécurité nationale et de renseignement qu'elle mène dans le cadre de ses vastes responsabilités, et à comprendre de quelle manière ces activités fonctionnent en pratique. Cet examen continuera de nous aider à dresser le portrait des différentes parties de l'appareil de sécurité et de renseignement, comment elles fonctionnent ensemble et nous permettra de trouver d'autres domaines à examiner.

268. Le Comité a aussi pris la décision d'examiner la question de l'ingérence étrangère. L'expérience du Canada et celle de nos plus proches alliés au cours des dernières années démontre que certains pays prennent des mesures de plus en plus agressives pour influencer nos institutions et nos processus politiques, une influence qui menace nos valeurs démocratiques et notre sécurité. En tant que pays pluraliste composé de communautés d'immigrants, le Canada n'est pas à l'abri de cette menace et doit être particulièrement vigilant à l'égard des efforts par des pays étrangers de menacer ou de manipuler ces communautés à leurs propres fins. En 2019, le Comité étudiera la menace que présente l'ingérence étrangère envers la sécurité du Canada et les mesures en place pour la déjouer.

269. Inspiré par les récents travaux du Comité du renseignement et de la sécurité du Royaume-Uni, le Comité a décidé de regarder plus attentivement les questions de diversité et d'inclusion dans l'appareil de sécurité et de renseignement. Ces questions sont importantes : la population du Canada devrait pouvoir se reconnaître dans sa fonction publique. L'inclusion et la diversité sont d'autant plus importantes pour les organisations de sécurité et de renseignement, qui doivent faire en sorte que leurs analyses et leurs conseils puissent profiter d'un vaste éventail de perspectives et d'expériences et que leurs enquêtes soient menées par des personnes qui comprennent les communautés et les gens visés. À compter de 2019, le Comité fera le suivi de la situation de l'inclusion et de la diversité dans l'appareil de sécurité et de renseignement, et mobilisera des représentants de l'appareil pour cerner les meilleures pratiques et les domaines où il est possible de faire mieux.

Conclusion

270. Le mandat et les responsabilités du Comité sont importants. Tous au long de ses travaux, l'an dernier, le Comité s'est efforcé de mieux comprendre l'appareil de la sécurité et du renseignement et de créer des relations productives avec les fonctionnaires qui le dirigent. Le Comité est convaincu que ses examens contribueront, au fil du temps, à renforcer le fonctionnement et la responsabilisation de l'appareil de la sécurité et du renseignement du Canada et à rehausser les connaissances des Canadiennes et des Canadiens de cet important aspect du gouvernement.