Chapitre 1 : La diversité et I'inclusion clans l'appareil de la sécurité et du renseignement — Efforts des organisations pour promouvoir la diversité et l'inclusion
Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement : Rapport annuel 2019
Efforts des organisations pour promouvoir la diversité et l'inclusion
64. Dans la première partie du présent chapitre, un aperçu des exigences relatives à l'équité en matière d'emploi et l'état de la diversité dans l'appareil de la sécurité et du renseignement en 2017-2018 ont été présentés. Le reste du chapitre ira au-delà des obligations relatives à l'équité en matière d'emploi, et évaluera les efforts qu'ont déployés les organisations pour promouvoir la diversité et l'inclusion au sein de leur effectif.
Promotionde la diversité
65. La présente section porte sur les activités de promotion de la diversité menées par les organisations de l'appareil de la sécurité et du renseignement. L'importance du rôle des dirigeants dans ces activités, ainsi que les efforts déployés pour susciter l'adoption dans l'organisation, analyser et comprendre l'effectif et recruter et embaucher des membres des divers groupes sont évalués.
Dirigeants et responsabilisation
66. Les dirigeants et les politiques organisationnelles jouent un rôle essentiel dans la promotion et l'établissement de la diversité Note de bas de page 94 . La feuille de route sur la diversité établie par le SCRS en 2010 indique que [traduction] « la diversité durable et l'inclusion nécessitent un engagement visible de la part des dirigeants de l'organisation Note de bas de page 95 ». Les dirigeants de toutes les organisations visées par l'examen reconnaissent que la diversité et l'inclusion sont essentielles au succès de leur organisation. Une des expressions les plus manifestes du leadership organisationnel consiste à désigner un « champion Note de bas de page 96 ». Toutes les organisations visées ont nommé des champions parmi les cadres supérieurs qui agissent à titre de porte-parole et de défenseurs de différents groupes et de différentes initiatives. Des champions ont été nommés pour les quatre groupes désignés et pour la communauté LGBTQ2+, ainsi que pour les initiatives plus générales, comme des champions pour la diversité et l'inclusion, I'ACS+, et les femmes, la paix et la sécurité Note de bas de page 97 .
67. Une autre expression du leadership organisationnel est la mesure dans laquelle la responsabilité envers la diversité est répartie dans l'ensemble de l'organisation Note de bas de page 98 . D'après l'examen des systèmes d'emploi de Sécurité publique Canada réalisé en 2018, les efforts de promotion de la diversité et de l'inclusion [traduction] « ont été minés par le fait que l'équité en matière d'emploi a été traitée à titre de programme distinct plutôt que d'être vue comme un moyen de relever les obstacles auxquels se heurtent les groupes désignés et de prendre des mesures pour créer un effectif représentatif et un milieu de travail inclusif Note de bas de page 99 . » Dans bon nombre d'organisations visées par l'examen, la diversité et l'inclusion ne relèvent que du service des Ressources humaines, et ne sont pas intégrées aux autres secteurs de l'organisation. Par exemple, d'après l'examen des systèmes d'emploi du BCP de 2015, les objectifs d'équité en matière d'emploi avaient été établis par la division des Ressources humaines en tant que « programme autonome Note de bas de page 100 ». Les gestionnaires ne participaient aucunement à l'élaboration de plans ou de stratégies visant à atteindre ces objectifs. Selon l'examen du BCP, cette pratique empêche « les gestionnaires de participer à la création d'un effectif représentatif et d'un milieu de travail inclusif Note de bas de page 101 . » En revanche, la GRC a créé, en 2016, l'unité Culture et Mobilisation des employés, qui a le mandat de promouvoir l'égalité entre les sexes et un changement de culture au sein de l'organisation Note de bas de page 102 . Le dirigeant de cette unité participe activement et régulièrement à des discussions avec des cadres supérieurs de l'organisation dans le but de favoriser la diversité et l'inclusion à l'échelle de I'organisation Note de bas de page 103 .
68. Les ministres doivent rendre des comptes au premier ministre et, par le fait même, aux Canadiens quant à leur engagement en matière de diversité et d’inclusion. En décembre 2016, le premier ministre a rencontré des dirigeants de l'appareil de la sécurité et du renseignement, ainsi que des représentants du BCP, et leur a demandé de fonder un groupe d'experts chargé de questions précises liées à la diversité et à l’inclusion au sein de leur organisation. En janvier 2017, les dirigeants des FAC, de la Garde côtière canadienne, de l'ASFC, du SCRS, du CST, du MDN et de la GRC ont fondé l’Équipe spéciale sur la diversité et l'inclusion du secteur de la sécurité et du renseignement, dont le mandat était [traduction] « d'envisager, de promouvoir et de mettre en œuvre des efforts conjoints pour accroître la diversité et l'inclusion au sein de leur organisation au moyen de diverses activités et initiatives Note de bas de page 100 . » L’Équipe se réunissait toutes les sept semaines environ et rendait des comptes au sous-secrétaire du Cabinet (résultats et livraison) tous les six mois. Au moment de rédiger le présent rapport, l'Équipe ne s'était pas réunie depuis juillet 2018 Note de bas de page 105 . L’Équipe spéciale a, entre autres, réalisé des initiatives conjointes de recrutement, comme le Salon des carrières du Réseau des jeunes professionnels du CST, et a participé au Réseau ACS+ de la sécurité et de la défense Note de bas de page 106 . L’Équipe spéciale est aussi à l'origine de la fondation par les FAC, l'ASFC, la Garde côtière et la GRC du Groupe de travail sur la modernisation des uniformes, dont le mandat était de concevoir un uniforme et des pratiques d'approvisionnement plus inclusifs dans l'ensemble des quatre organisations Note de bas de page 107 .
69. Le Comité a déterminé que cette dernière initiative de !'Équipe spéciale comportait plusieurs lacunes. Premièrement, l'Équipe spéciale n'a pas établi d'objectifs précis pour ce qui est de la diversité et de l'inclusion ni n'a élaboré un cadre de mesure du rendement pour évaluer le succès de ses initiatives Note de bas de page 108 . Deuxièmement, les représentants des organisations étaient tous des membres des Ressources humaines et les organisations n'avaient pas cherché à faire participer des membres des groupes désignés Note de bas de page 109 ou à les intégrer à l'Équipe spéciale. De plus, les organisations n'envoyaient pas toujours les mêmes représentants. Troisièmement, !'Équipe n'a pas sollicité la contribution des membres des groupes désignés de l'appareil de la sécurité et du renseignement pour influencer ses activités ou initiatives. Finalement, dans ses discussions, l'Équipe s'est concentrée sur des initiatives à court terme sans prendre en considération les problèmes systémiques soulevés dans diverses études propres aux organisations ou dans des recours collectifs (FAC et GRC), comme la culture et la discrimination dans le milieu de travail Note de bas de page 110 .
70. Au sein des ministères et des organismes, la responsabilité des dirigeants de la fonction publique à l'égard des résultats est une pierre angulaire du leadership111. Selon la politique du SCT, les ententes de gestion du rendement des cadres supérieurs de tous les ministères et organismes fédéraux doivent comporter un indicateur relatif à la diversité et à l'inclusion Note de bas de page 112 . Les ministères et les organismes rédigent leurs propres indicateurs du rendement en fonction des priorités organisationnelles établies par le greffier du Conseil privé Note de bas de page 113 . Cependant, ce sont les cadres intermédiaires qui sont responsables de la majorité des tâches relatives à l'embauche et à la gestion quotidienne des employés Note de bas de page 114 . Des neuf organisations visées par l'examen, seulement deux, le SCRS et le CST, ont ajouté un indicateur relatif à la diversité et à l'inclusion dans les ententes de rendement des cadres intermédiaires Note de bas de page 115 . L'effort est louable, mais leurs indicateurs manquent de précision et d'objectifs mesurables. Au SCRS, par exemple, l'aptitude des gestionnaires à promouvoir un [traduction] « milieu de travail sain » est évaluée Note de bas de page 116 . Au CST, [traduction] « les efforts [des gestionnaires] pour créer un milieu de travail représentatif et inclusif en encourageant les employés à remplir la déclaration volontaire et à participer aux initiatives liées à la diversité et à l'inclusion » sont évalués Note de bas de page 117 .
71. Les difficultés liées à assurer la responsabilisation des dirigeants à l'égard de la diversité et de l'inclusion sont aggravées par l'absence de méthodes établies pour mesurer le succès ou le progrès des organisations relativement à la diversité et à l'inclusion au sein de la fonction publique. Comme l'a soulevé le Groupe de travail conjoint syndical-patronal sur la diversité et l'inclusion, il n'existe aucun cadre pangouvernemental ni approche en ce qui a trait à la diversité et à l'inclusion et, « sans objectifs définis, données et mesures de rendement, il est difficile de déterminer les progrès et de savoir si les initiatives en cours permettront à elles seules de réduire le nombre d'obstacles systémiques ou d'éliminer tous ces obstacles Note de bas de page 118 . » Ce fait s'applique aussi à l'appareil de la sécurité et du renseignement. Peu d'organisations visées par l'examen ont établi un cadre d'évaluation du rendement pour leurs objectifs et leurs initiatives en matière de diversité et l'inclusion. Il y a trois exceptions partielles. En 2013-2014, le SCRS a créé une feuille de pointage sur la diversité dans le but de mesurer son progrès relatif à l'équité en matière d'emploi, mais a cessé de suivre le progrès en 2016 en raison d'un manque de ressources Note de bas de page 119 . Dans leur Plan d'équité en matière d'emploi 2015-2020, les FAC ont indiqué leur intention d'élaborer un plan d'évaluation et de mesure du rendement, mais aucun progrès n'a été réalisé à cet effet Note de bas de page 120 . Comme dernier exemple, l'Équipe spéciale sur la diversité et l'inclusion du secteur de la sécurité et du renseignement a indiqué dans une lettre au sous-secrétaire du Cabinet (résultats et livraison) en septembre 2017 son intention [traduction] « d'élaborer un cadre de mesure du rendement pour l'appareil de la sécurité et du rendement qui servirait à suivre les questions liées à la diversité. » Ce cadre n'a pas été élaboré Note de bas de page 121 .
Adoption au sein de l'organisation
72. D'après les recherches, l'engagement des dirigeants en matière de diversité est important, mais il est essentiel de s'assurer que les employés de l'ensemble de l'organisation, surtout les cadres intermédiaires, comprennent et acceptent la valeur de la diversité en tant qu'élément essentiel de la réussite de toutes les initiatives Note de bas de page 122 . Toutefois, des malentendus au sujet des objectifs en matière de diversité et d'inclusion, et même la résistance à la mise en oeuvre de ces objectifs, persistent. Par exemple, la GRC a remarqué que ce sont les sous-officiers supérieurs qui montrent le plus de résistance face aux initiatives liées à la diversité et à l'inclusion Note de bas de page 123 . De même, dans l'examen des systèmes d'emploi des FAC de 2013, une résistance persistante face à l'importance de la diversité a été relevée, y compris parmi les cadres supérieurs de l'organisation Note de bas de page 124 . Dans le dernier examen des systèmes d'emploi du MDN, il a été déterminé que [traduction] « Seuls les cadres supérieurs des niveaux les plus élevés étaient en mesure de décrire les avantages pour l'organisation de se doter d'un effectif plus diversifié Note de bas de page 125 . » Enfin, il est indiqué dans l'examen des systèmes d'emploi du CST de 2017 que [traduction]« l'équité en matière d'emploi et la diversité manquaient de visibilité et que la contribution de ces aspects aux résultats de l'organisation n'était pas suffisamment reconnue Note de bas de page 126 . »
73. Diverses organisations ont mis en œuvre des mesures visant à mieux informer leurs membres de la valeur et de l'importance de la diversité et de l'inclusion. Par exemple, en 2010, le SCRS a demandé un rapport sur la diversité et les pratiques exemplaires dans le but d'améliorer la diversité et l'inclusion au sein de l'organisation Note de bas de page 127 . Ce rapport se démarque à titre d'outil pour justifier les initiatives et mettre en œuvre des stratégies pour accroître la diversité à l'échelle du SCRS. Dans la même veine, les FAC ont élaboré une stratégie sur la diversité, qui « formera le cadre à l'intérieur duquel [l'organisation va] orienter, favoriser et protéger le respect et la dignité de chaque personne, et en faire une valeur fondamentale de [l']institution Note de bas de page 128 . » De plus, le MDN et les FAC élaborent conjointement un plan d'action sur la diversité civile et militaire Note de bas de page 129 .
74. La plupart des organisations offrent aussi de la formation en ligne sur l'équité en matière d'emploi et la diversité. Le SCRS et le CST offrent de la formation sur l'équité en matière d'emploi et la diversité aux employés durant les séances d'intégration Note de bas de page 130 . L'ASFC offre un cours en ligne sur la diversité et les relations raciales qui est obligatoire pour tous les employés Note de bas de page 131 . Dans les autres organismes, ces cours sont facultatifs. Aucune organisation ne rend les cours sur la diversité et l'inclusion obligatoires pour l'obtention d'une promotion Note de bas de page 132 .
Efforts pour comprendre l'effectif
75. Selon la Loi sur l'équité en matière d'emploi, les organisations sont tenues de trouver les obstacles à l'emploi auxquels se heurtent les membres des groupes désignés et de mettre en œuvre des politiques et des pratiques pour éliminer ces obstacles. Pour ce faire, les organisations doivent évaluer et comprendre leur effectif. Comme il a été indiqué précédemment, en 2015, le gouvernement a renouvelé son engagement à favoriser la mise en œuvre complète de I' ACS+, un outil d'analyse utilise dans l'ensemble des organisations de la fonction publique fédérale, et conçu pour évaluer la façon dont les différents groupes sont touchés par les politiques et les programmes Note de bas de page 133 . Comme le font d'autres ministères, certaines organisations de l'appareil de la sécurité et du renseignement se servent de I' ACS+ pour relever les obstacles possibles au recrutement, à l'embauche et aux promotions.
76. L'évaluation ACS+ des politiques et des pratiques de dotation à AMC et à la GRC est ressortie à titre de pratique exemplaire parmi les organisations visées par l'examen. Par son évaluation, AMC visait à apporter un éclairage ACS+ à l'ensemble de ses politiques et de ses processus en matière de gestion et de ressources humaines Note de bas de page 134 . Dans son évaluation, la GRC recommandait de mettre à jour le matériel de recrutement et de revoir les exigences de façon à garantir des processus de recrutement et d'embauche équitables Note de bas de page 135 . De son côté, le MDN a indiqué, en 2018, dans une note d'information à l'intention du ministère des Femmes et de l'Égalité des genres qu'il avait réalisé [traduction] « une évaluation complète du Ministère (organisation, doctrine, culture) pour comprendre par où commencer, comment établir des priorités et comment sensibiliser l'organisation dans son ensemble et faire changer les différents secteurs et les cultures de travail Note de bas de page 136 . » Malgré les demandes répétées du Secrétariat du CPSNR, le MDN n'a pas fourni les documents de son évaluation au Comité.
77. Les organisations ont utilisé d'autres moyens pour comprendre la composition de leur effectif et les obstacles auxquels elles sont susceptibles de se heurter. Comme pratique exemplaire, AMC et la GRC ont réalisé une analyse de la concentration, qui, selon EDSC, sert à déterminer « s'il existe une proportion plus importante de membres des groupes désignés aux échelons inférieurs d'une catégorie professionnelle comparativement à leurs homologues n'appartenant pas aux groupes désignés Note de bas de page 137 . » L'analyse de la GRC a révélé d'importants segments d'Autochtones et de personnes handicapées à des postes d'administration et de bureau, ce qui a orienté son plan d'équité en matière d'emploi Note de bas de page 138 . D'après l'analyse d'AMC, les femmes sont regroupées aux échelons les plus bas des postes du Service extérieur Note de bas de page 139 . Des recherches effectuées à l'interne par le SCRS et AMC sur les obstacles auxquels se butent les femmes dans les postes de direction et du Service extérieur constituent aussi une pratique exemplaire Note de bas de page 140 . Ces recherches ont permis de fournir aux cadres supérieurs de l'information sur les obstacles systémiques et comportementaux à l'avancement des femmes dans chacune des organisations, et d'orienter les politiques et les initiatives visant à éliminer les obstacles relevés.
78. En ce qui a trait aux personnes faisant partie des minorités visibles, le MDN et les FAC ont signal au ministre du Patrimoine canadien, dans le cadre de son rapport annuel 2017-2018 sur le multiculturalisme, que le ministère réalisait une étude interne sur le racisme et la discrimination. Le MDN et les FAC ont indiqué dans ce rapport que la collecte de données pour cette étude était terminée et que [traduction] « les résultats fournissaient sur ces questions des renseignements importants à l'appui des efforts en vue de les traiter Note de bas de page 141 . » Malgré les demandes répétées, le MDN n'a pas fourni les résultats de cette étude ni aucun autre document connexe au Comité, y compris les études pertinentes qui sont venues à l'attention du Comité par l'intermédiaire des médias Note de bas de page 142 .
Recrutement et embauche
79. Les organisations ont besoin de recruter et d’embaucher des candidats d'origines diverses pour que leur effectif soit diversifié. Les recherches montrent que, pour y arriver, les organisations pourraient devoir modifier leurs stratégies de recrutement pour atteindre des candidats de genres, de compétences, de races et de milieux ethnoculturels divers et pour s'assurer que leurs pratiques d'embauche ne sont pas biaisées Note de bas de page 143 . Comme exemple pratique, la feuille de route sur la diversité établie par le SCRS en 2010 prônait l'établissement de relations avec diverses collectivités, la publication d'annonces et le recrutement dans les collèges et les universités, l'utilisation de services de recrutement spécialisés, la formation des personnes pour qu'elles acquièrent des compétences en entrevues interculturelles et l'examen des processus de recrutement pour éviter la partialité, au titre de pratiques exemplaires pour recruter une main-d’œuvre diversifiée Note de bas de page 144 .
80. En majorité, les organisations visées par l'examen ont adopté des stratégies de recrutement proactives et ciblées afin de combler les écarts de représentation pour tous les groupes désignés. Le SCRS et le CST, notamment, se démarquent grâce à leur collaboration avec un certain nombre d'organisations qui se spécialisent dans le recrutement de personnes handicapées et de femmes, et de l'embauche de recruteurs spécialisés en diversité dont le rôle est de mobiliser les groupes de différentes communautés ethnoculturelles et les associations d'étudiants Note de bas de page 145 . Autre initiative positive : le programme de stages Jeunes femmes en sécurité publique, lancé par Sécurité publique Canada et les organismes de son portefeuille dans le but de recruter davantage de femmes Note de bas de page 146 . L'ASFC est en train d'élaborer une stratégie triennale de recrutement et de maintien en poste destinée aux Autochtones, pour les postes d'agent des services frontaliers Note de bas de page 147 . En outre, plusieurs organisations ont déployé des efforts pour cibler des membres des groupes désignés dans leurs avis de dotation. L'ASFC, par exemple, a publié des avis pour plusieurs postes s'adressant à des personnes s'étant déclarées comme Autochtones, personnes handicapées ou personne faisant partie des minorités visibles Note de bas de page 148 . De même, le SCRS et le BCP ont encouragé les gestionnaires d'embauche à obtenir de l'information sur le ciblage des groupes désignés dans les avis de dotation Note de bas de page 149 .
81. AMC et la GRC ont réalisé des examens ACS+ de leurs processus de recrutement et d'embauche pour s'assurer qu'ils ne sont pas biaisés Note de bas de page 150 . Le guide d'AMC intitulé Guide to applying GBA+ using a Diversity and Inclusion Lens to Staffing visait à [traduction] « rafraîchir le processus de dotation conformément au principe de l'ACS+ dans le but d'atteindre la diversité et l'inclusion de l'effectif et du milieu de travail Note de bas de page 151 . » L'examen par la GRC de ses processus de recrutement avait pour but de relever les obstacles auxquels se heurtent les candidats d'origines diverses à différentes étapes du processus de recrutement et d'embauche Note de bas de page 152 . En ce qui a trait aux pratiques d'embauche impartiales, l'ASFC et AMC se démarquent par la façon dont ils assurent une représentation des groupes désignés au sein des comités de sélection et dont ils offrent une formation sur l'impartialité aux responsables des entrevues Note de bas de page 153 .
L'évaluation du Comité sur les efforts des organisations pour favoriser la diversité
82. Les dirigeants de l'appareil de la sécurité et du renseignement reconnaissent l'importance d'un effectif diversifié, et certaines organisations ont déployé des efforts dans le but de favoriser la diversité au sein de leur effectif. Toutefois, les cadres et les gestionnaires ont une responsabilisation limitée au sujet de la diversité et de l'inclusion, et les organisations n'ont pas élaboré de cadre de mesure du rendement pour mesurer le progrès. La responsabilité à l'égard de la diversité et de l'inclusion tend à être attribuée principalement au secteur des ressources humaines, plutôt que d'être répartie dans l'ensemble de l'organisation, y compris parmi les cadres intermédiaires, qui prennent la plupart des décisions relatives à l'embauche. À l'extérieur du contexte organisationnel, le leadership de l'appareil de la sécurité et du renseignement (l'Équipe spéciale) souffre des faiblesses marquées, notamment un manque de diversité dans sa propre composition et le fait qu'elle se penche surtout sur les mesures à court terme. Enfin, bien que les organisations aient pris des mesures pour accroître la représentation des groupes désignés au moyen du recrutement, peu d'entre elles ont fait des efforts pour mieux comprendre les obstacles auxquels se heurtent les membres des groupes désignés au sein de leur effectif ou pour vérifier l'impartialité de leurs politiques internes.
Favoriser l'inclusion
83. D'après le Groupe de travail conjoint syndical-patronal sur la diversité et l'inclusion du SCT, « Un milieu de travail inclusif est juste, équitable, positif, accueillant et empreint de respect. Il reconnaît et met en valeur les différences sur le plan de l'identité, des habiletés, des antécédents, des cultures, des aptitudes, des expériences et des points de vue qui appuient et renforcent le cadre des droits de la personne en évolution du Canada, en plus d'en tirer parti Note de bas de page 154 . » Contrairement aux mesures sur la diversité, plus particulièrement les taux d'emploi relatifs aux groupes désignés, l'inclusion est une question plus difficile à quantifier et à traiter. En fait, il n'existe aucune méthode pangouvernementale pour mesurer le progrès des organisations en matière d'inclusion, comme l'indique le paragraphe 70.
84. Selon la définition d'un effectif inclusif, le Comité a relevé trois aspects importants à examiner. Le premier: la prévalence du harcèlement, de la violence et de la discrimination dans l'appareil de la sécurité et du renseignement ainsi que les efforts déployés pour remédier à ces problèmes Note de bas de page 155 . Le deuxième : les efforts pour favoriser l'avancement de carrière des membres des groupes désignés. Comme le montre le présent rapport, les membres des groupes désignés sont toujours sous-représentés dans les postes de direction. Le troisième : les efforts déployés pour faire participer les groupes désignés à l'élaboration des politiques et des processus relatifs à la diversité et à l'inclusion. Il est non seulement important de reconnaître cette participation, de la valoriser et d'en tirer parti, mais il s'agit aussi d'une exigence imposée aux organisations dans la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Chaque aspect est traité ci-après.
Harcèlement, violence et discrimination
85. Dans le budget de 2018, le gouvernement a indiqué que la lutte contre la violence et le harcèlement au travail faisait partie de ses objectifs Note de bas de page 156 . D'après le rapport du Groupe de travail des sous-ministres sur le harcèlement, fondé par le greffier, les organisations de la fonction publique ont la responsabilité d'offrir à leurs employés « un milieu de travail sain et sécuritaire, exempt de toute forme de harcèlement et de comportements inappropriés Note de bas de page 157 ». Cependant, du harcèlement, de la violence et de la discrimination sont encore perçus dans la plupart des organisations gouvernementales, y compris dans l'appareil de la sécurité et du renseignement.
86. Le SCT définit le harcèlement comme suit :
comportement inopportun et offensant d'un individu envers un autre individu en milieu de travail, y compris pendant un événement ou à un autre endroit lié au travail, et dont l' auteur savait ou aurait raisonnablement dû savoir qu'un tel comportement pouvait offenser ou causer préjudice. Il comprend tout acte, propos ou exhibition qui diminue, rabaisse, humilie ou embarrasse une personne, ou tout acte d'intimidation ou de menace. Il comprend également le harcèlement au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne (c.-à-d. en raison de la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l'âge, le sexe, l'orientation sexuelle, l'état matrimonial, la situation de famille, la déficience ou l'état de personne graciée) Note de bas de page 158 .
87. Le SCT définit la discrimination comme suit :
La discrimination, c'est le fait de réserver à quelqu'un un traitement différent ou inéquitable en raison d'une caractéristique personnelle ou d'une distinction, intentionnellement ou non, qui a pour effet d'imposer des désavantages non imposés à d'autres, ou d'empêcher ou de restreindre l'accès aux avantages offerts à d’autres membres de la société. Il y a 13 motifs de distinction illicite dans la Loi canadienne sur les droits de la personne (c.-à-d. fondé sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l'orientation sexuelle, l'identité ou l’expression de genre, l'état matrimonial, la situation de famille, les caractéristiques génétiques, la déficience (ou le handicap), ou l'état de personne graciée Note de bas de page 159 ).
88. Parmi les organisations de l'appareil de la sécurité et du renseignement, trois ont eu à composer avec des poursuites relatives à des allégations de harcèlement, de violence ou de discrimination. Fait particulièrement notable, les FAC et la GRC ont fait ou font actuellement l'objet de recours collectifs pour des allégations de problèmes systémiques de longue date de harcèlement, de violence et de discrimination au travail. Certains de ces recours ont donné lieu à des excuses officielles et à des règlements de l'ordre de plus d'un milliard de dollars Note de bas de page 160 . Le SCRS a aussi réglé une poursuite en 2017 de plusieurs millions de dollars intentés par cinq employés de la région de Toronto qui alléguaient de l'islamophobie, du racisme et de l'homophobie Note de bas de page 161 . Au cours de la même période, des examens sur la culture organisationnelle des trois organisations ont mis en lumière d'importants problèmes. Un examen effectué en 2015 par l'ancienne juge de la Cour suprême Marie Deschamps et intitulé Examen externe sur l'inconduite sexuelle et le harcèlement sexuel dans les Forces armées canadiennes a fait état « d'une culture sexualisée sous-jacente hostile aux femmes et a aux membres de la communauté LGBTQ Note de bas de page 162 . » D'après une évaluation du climat de travail réalisée en 2017 sur le bureau du SCRS dans la région de Toronto, ce bureau présentait des problèmes d'abus de pouvoir et des craintes de représailles, ainsi qu'un manque de confiance en la gestion Note de bas de page 163 . Enfin, un examen sur la culture à la GRC effectué en 2017 par la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes a révélé des problèmes de longue date de harcèlement et a « confirmé la persistance de problèmes d'intimidation et de harcèlement Note de bas de page 164 . »
89. Ces organisations se sont attaqué aux problèmes de harcèlement, de discrimination et de violence en mettant sur pied divers programmes et diverses initiatives. Le SCRS a mis en œuvre un plan d'action sur le milieu de travail en 2017 dans lequel il traite de questions de culture organisationnelle. La GRC et le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile ont annoncé la création d’un conseil consultatif intérimaire de gestion en janvier 2019, dont le mandat est, entre autres, de conseiller les organisations sur la façon d'améliorer leurs politiques et leurs procédures relatives au harcèlement au travail.
90. Les FAC ont réalisé des sondages sur le harcèlement au sein des forces armées. Toutefois, d'après le Sondage des Forces canadiennes sur le harcèlement en milieu de travail réalisé en 2012, [traduction] « l'essentiel de la recherche sur le harcèlement au sein des FAC remonte aux années 1990, et très peu de recherches approfondies ont été menées depuis. » Le sondage de 2012 est le dernier sondage approfondi sur le harcèlement au travail effectué au sein de la Force régulière, et le faible taux de réponse [traduction] « peut avoir influencé les résultats » de façon importante Note de bas de page 165 . Des sondages semblables ont été effectués auprès des réservistes, des cadets et des candidats à la qualification militaire de base en 2015 Note de bas de page 166 . Les FAC ont lancé l'opération HONOUR en juin 2015 pour résoudre et prévenir les questions de harcèlement sexuel dans :es forces armées Note de bas de page 167 . Les FAC ont surveillé fréquemment les perceptions de leurs membres sur le harcèlement dans l'ensemble des Forces au cours des cinq dernières années dans le cadre d'un vaste sondage portant sur un grand éventail de questions, de politiques et d'expériences liées au personnel Note de bas de page 168 .
91. Les progrès sur ces questions se font lentement. Les FAC reconnaissent que l'élimination du harcèlement et de la violence nécessite une transformation de leur culture organisationnelle à long terme, et elles n'ont pas encore établi un délai pour y arriver Note de bas de page 169 . D'après plusieurs examens des mesures des FAC à cet effet, l'organisation a fait peu de progrès au cours des quatre dernières années. En 2019, Statistique Canada a déterminé que la prévalence des agressions sexuelles au sein des FAC en 2018 était semblable à celle de 2016. Dans le rapport d'étape de l'opération HONOUR des FAC, l'organisation indique elle-même qu'elle n'a mis en œuvre que trois des dix recommandations formulées dans le rapport de la juge Deschamps de 2015 Note de bas de page 170 . D'après un rapport de mai 2019 du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, « les mesures mises en place jusqu'à présent [depuis quatre ans] ne sont pas suffisantes et du travail additionnel reste à faire Note de bas de page 171 ». Comme les FAC, la GRC a de la difficulté à régler les questions du harcèlement et de la violence généralisés en milieu de travail. La Commission civile d'examen et de traitement des plaintes a indiqué dans son rapport de 2017 sur le harcèlement à la GRC qu’ « après chaque scandale de harcèlement qui a étalé au grand jour sa culture organisationnelle dysfonctionnelle, la GRC s'est contentée de se serrer les coudes Note de bas de page 172 ». Le rapport rajoute que « s'il y a une leçon à tirer de la dernière décennie, de la quinzaine de rapports et des centaines de recommandations en faveur d'une réforme, c'est que la GRC est incapable de procéder elle-même aux réformes systémiques nécessaires Note de bas de page 173 ».
92. Le harcèlement et la discrimination sont également présents dans les autres organisations visées par l'examen. L'encadré qui suit présente les résultats du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux (SAFF) de 2017, un sondage anonyme utilisé pour obtenir l'opinion des fonctionnaires sur leur milieu de travail Note de bas de page 174 . L'encadré dresse une comparaison entre les taux moyens de harcèlement et de discrimination dans l'ensemble de la fonction publique et les taux de harcèlement et de discrimination calculés à l'ASFC, au CST, au MDN, à AMC, à Sécurité publique Canada, au BCP et à la GRC à partir du SAFF de 2017. Le SCRS et les FAC ne sont pas compris parce qu'ils ne participent pas au SAFF. Le SCRS a effectué un sondage distinct auprès de ses employés en 2015. L'opinion des membres des FAC est sollicitée dans le cadre du Sondage des Forces canadiennes sur le harcèlement en milieu de travail et le sondage annuel À vous la parole.
Les résultats sur le harcèlement et la discrimination du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux (SAFF) de 2017
Les résultats du SAFF 2017 ont révélé ce qui suit :
- Des fonctionnaires ayant répondu au sondage, 18 % ont indiqué avoir été victimes de harcèlement, et 8 % ont indiqué avoir été victimes de discrimination au travail au cours des deux dernières années.
Harcèlement
- Parmi les employés de la fonction publique, 19 % des femmes, 28 % des Autochtones, 18 % des personnes faisant partie des minorités visibles et 37 % des employés handicapés ont indiqué avoir été victimes de harcèlement au travail au cours des deux dernières années.
- Dans la moitié des organisations visées par l'examen, les femmes ont été victimes de harcèlement dans une proportion plus grande que la moyenne de la fonction publique.
- Dans la moitié des organisations visées par l'examen, les personnes handicapées ont été victimes de harcèlement dans une proportion plus grande que la moyenne de la fonction publique.
Discrimination
- Parmi les employés de la fonction publique, 8 % des femmes, 15 % des Autochtones, 13 % des personnes faisant partie des minorités visibles et 25 % des personnes handicapées ont indiqué avoir été victimes de discrimination au travail au cours des deux dernières années.
- Dans la majorité des organisations visées par l'examen, les femmes ont été victimes de discrimination dans une proportion plus grande que la moyenne de la fonction publique.
- Dans la moitié des organisations visées par l'examen, les personnes faisant partie des minorités visibles ont été victimes de discrimination dans une proportion plus grande que la moyenne de la fonction publique.
- Dans la majorité des organisations visées par l'examen, les personnes handicapées ont été victimes de discrimination dans une proportion plus grande que la moyenne de la fonction publique.
ASFC
- Les taux de harcèlement et de discrimination à l'ASFC sont plus élevés que la moyenne de la fonction publique pour tous les groupes désignés.
Analyse des résultats du sondage et suivi des plaints
93. Dans son rapport, le Groupe de travail des sous-ministres sur le harcèlement a souligné l'importance de l'analyse des données pour cerner les cas de harcèlement au travail et les éliminer Note de bas de page 175 . Il recommande d'utiliser « des outils quantitatifs et qualitatifs pour avoir un bon aperçu des secteurs où le harcèlement est le plus susceptible de se produire Note de bas de page 176 ». Certaines des organisations visées par l'examen ont cherché à mieux comprendre la prévalence du harcèlement et de la discrimination et le bien-être des employés au sein de leur organisation en analysant les résultats du SAFF, en réalisant des sondages supplémentaires et en faisant le suivi des plaintes de harcèlement et de violence. L'ASFC, AMC, le BCP et le MDN ont produit des analyses détaillées des résultats du SAF F relatifs aux groupes désignés en fonction des sources de harcèlement et de discrimination Note de bas de page 177 . Le CST et la GRC n'ont pas effectué d'analyse des résultats du SAFF selon les groupes désignés. Le SCRS et le CST ont effectué des sondages internes (autres que le SAFF) auprès des employés au sujet de leur bien-être, mais le CST n'a pas analysé les résultats de ces sondages selon les groupes désignés Note de bas de page 178 . Le MDN et les FAC préparent une [traduction] « Enquête sur le bien-être au travail de la Défense » pour mesurer la santé psychologique et le bien-être de leurs employés Note de bas de page 179 .
94. La majorité des organisations visées par l'examen font le suivi du nombre de plaintes officielles de harcèlement et font des rapports à ce sujet. Cela dit, la GRC, le MDN et les FAC ont remarqué des lacunes dans leurs systèmes de suivi. La GRC a indiqué que les plaintes sur des questions liées au milieu de travail qui ne répondent pas à la définition de harcèlement sont encore renvoyées au processus de traitement des plaintes de harcèlement, en l'absence d'autres formes de recours officiels, ce qui fausse les statistiques Note de bas de page 180 . Le MDN et les FAC ont qualifié leur système commun de suivi des plaintes de harcèlement, en service depuis 2012, [traduction] « de très sous-utilisé » par les personnes responsables d'y entrer les données sur les plaintes de harcèlement Note de bas de page 181 . Le MDN continue d'utiliser son système pour consigner les plaintes, mais les FAC ont établi de leur côté un nouveau Système intégré de gestion et d'enregistrement des plaintes en 2018 Note de bas de page 182 .
95. Les préoccupations au sujet de la précision des systèmes de suivi des plaintes pointent vers un problème plus vaste, à savoir la réticence des employés à signaler les cas de harcèlement et de discrimination. Le Groupe de travail des sous-ministres sur le harcèlement a constaté que « de nombreux cas de harcèlement en milieu de travail ne sont jamais signalés » par les employés par manque de confiance en le processus, par manque de connaissance du processus ou par crainte de représailles Note de bas de page 183 . En fait, selon le Sondage auprès des employés du SCRS de 2015, les employés évoquent le plus souvent comme raison pour ne pas déposer une plainte officielle de harcèlement [traduction] « qu'ils ne croient pas qu'une plainte ferait une différence Note de bas de page 184 . » Cela dit, plusieurs des organisations visées par l'examen ont fait des efforts pour expliquer le processus de traitement des plaintes et bâtir la confiance des employés au moyen de formations et de guides d'information Note de bas de page 185 .
Politiques de lutte contre le harcèlement et formation corrective
96. D'après la politique du SCT, toutes les organisations visées par l'examen ont instauré une politique sur le harcèlement et la violence au travail Note de bas de page 186 . Toutefois, dans un rapport d'Emploi et Développement social Canada sur le harcèlement et la violence au travail de 2017, plusieurs problèmes liés au cadre réglementaire et juridique fédéral actuel sur le sujet ont été relevés Note de bas de page 187 . Les deux observations principales suivantes ont été formulées : le régime de prévention actuel « n'aborde pas adéquatement l'éventail de comportements inappropriés survenant en milieu de travail » et les règlements en place dans les milieux de travail sous règlementation fédérale « ne comprennent aucune disposition sur le harcèlement Note de bas de page 188 ». La Loi modifiant le Code canadien du travail (harcèlement et violence), la Loi sur les relations de travail au Parlement et la Loi d'exécution du budget, 2017, n° 1 modifie le cadre actuel de prévention du harcèlement et de la violence dans les milieux de travail sous réglementation fédérale Note de bas de page 189 . D'après cette loi, les employeurs sont tenus de prendre des mesures pour prévenir le harcèlement au travail et protéger les employés, traiter les cas de harcèlement et de violence et soutenir les employés touchés. Ainsi, l'employeur doit « enquêter [...] tous les incidents de harcèlement et de violence, ainsi qu'il doit les enregistrer et les signaler Note de bas de page 190 . » En conséquence, la majorité des organisations visées par l'examen doivent mettre à jour leurs politiques en matière de harcèlement en prévision de l'entrée en vigueur de cette loi d'ici les deux prochaines années Note de bas de page 191 .
97. Les organisations ont mis en place une formation sur la lutte contre le harcèlement obligatoire pour tous les employés. Dans la plupart des organisations, les employés suivent la formation en ligne et sont tenus de le faire une fois dans le cadre de leur carrière. Le MDN et les FAC font exception : ils ont instauré une formation en personne obligatoire pour tous les employés, y compris les superviseurs et les gestionnaires, sur la prévention du harcèlement et sur l'intervention de témoins Note de bas de page 192 . La question de la discrimination reçoit nettement moins d'attention, malgré la prévalence du problème à l'échelle des organisations visées. L'ASFC est la seule organisation parmi les neuf visées qui exige que ses employés et ses gestionnaires suivent une formation sur la lutte contre le racisme et la discrimination Note de bas de page 193 .
Promotions, perfectionnement professionnel et mentorat
98. Un accès juste et équitable aux possibilités de promotion et de formation est essentiel à un milieu de travail inclusif Note de bas de page 194 . L'examen par le Comité des taux de promotion et des possibilités de perfectionnement professionnel et de mentorat a révélé ce qui suit :
- Taux de promotion : Dans la majorité des organisations visées, dont les FAC, le CST, l'ASFC, le CIET et la GRC, les taux de promotion pour chacun des groupes désignés étaient proportionnels à leur représentation générale au sein de l'organisation. Les taux de promotion pour les personnes handicapées étaient inférieurs au taux moyen de promotion au MDN. Toutefois, peu d'organisations visées par l'examen ont fourni des taux de promotion ventilés selon la catégorie professionnelle, ce qui permet difficilement d'établir si les promotions des membres des groupes désignés sont réparties proportionnellement dans tous les groupes professionnels, ou si elles sont concentrées dans certains groupes.
- Perfectionnement professionnel : Peu d'organisations ont fourni de l'information sur la formation favorisant le perfectionnement professionnel ou sur l'accès à ce type de formation. Il y avait deux exceptions : les occasions de formation en leadership pour les femmes au SCRS, et la participation d'AMC à l'initiative de formation des Autochtones au leadership de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada Note de bas de page 195 .
- Mentorat : Certaines organisations de l'appareil de la sécurité et du renseignement ont établi des programmes officiels de mentorat, mais peu d'entre eux sont destinés à des groups désignés précis Note de bas de page 196 . Il y a deux exceptions : le programme de mentorat du Comité consultatif sur les minorités visibles de l'ASFC et le programme officiel de mentorat établi par le Réseau des femmes du SCRS Note de bas de page 197 .
Mobilisation des employés
99. La Loi sur l'équité en matière d'emploi exige de chaque employeur qu'il consulte les représentants de ses employés sur deux aspects. Premièrement, il doit les consulter au sujet de l'aide que les représentants pourraient lui apporter pour faciliter l'équité en matière d'emploi dans le milieu de travail et au sujet de la communication aux employés des questions relatives à l'équité en matière d'emploi. Deuxièmement, il doit les consulter au moment de la préparation, de la mise en œuvre et de la révision de son plan relatif à l'équité en matière d'emploi Note de bas de page 198 . Les comités consultatifs dirigés par l'employeur sont les principaux forums par l'intermédiaire desquels les membres des groupes désignés peuvent exprimer leurs préoccupations et leurs commentaires sur des questions de diversité et d'inclusion. La participation à ces comités est volontaire, et ceux-ci devraient compter des représentants de tous les groupes désignés.
100. Toutes les organisations visées par l'examen ont établi un ou plusieurs comités consultatifs, mais l'ampleur du rôle qu'ils jouent dans l'élaboration des politiques organisationnelles diffère selon l'organisation. Par exemple, les comités consultatifs de l'ASFC, du SCRS, d'AMC et du BCP, respectivement, contribuent régulièrement aux politiques et aux pratiques relatives à l'emploi Note de bas de page 199 . La GRC a récemment regroupé tous ses comités consultatifs en un seul comité qui a été officiellement intégré au processus de planification de l'équité en matière d'emploi Note de bas de page 200 . En revanche, d'après l'examen des systèmes d'emploi du CST réalisé en 2017, l'engagement du comité consultatif sur ces enjeux dans cet organisme est limité Note de bas de page 201 . Par ailleurs, dans le cadre de l'examen des systèmes d'emploi des FAC en 2013, il a été déterminé que peu de militaires étaient au courant de l'existence ou du rôle des groupes consultatifs de la Défense. Note de bas de page 202
Minorités visibles dans l'appareil de la sécurité et du renseignement
D'après les données du recensement de 2016, les personnes faisant partie des minorités visibles représentent 22,3 % de la population, parmi lesquels les trois principaux groupes sont les Sud-asiatiques, les Chinois et les Canadiens de race noire. Selon les projections démographiques, d'ici 2036, les personnes faisant partie des minorités visibles pourraient représenter de 31,2 % à 35,9 % de la population totale Note de bas de page 203 .
Les personnes faisant partie des minorités visibles sont sous-représentées dans la majorité des organisations visées par l'examen, surtout dans les postes à la direction. Cet écart de représentation augmentera probablement au cours des prochaines années, car le nombre de personnes faisant partie des minorités visibles au Canada devrait changer, selon les nouvelles estimations de la DPA et de la DMT. De plus, les données recueillies sur ce groupe sont incomplètes, compte tenu de l'absence de données ventilées selon le sexe, ce qui brouille la représentation des femmes faisant partie des minorités visibles au sein des organisations Note de bas de page 204 .
De même, la représentation et le recrutement de personnes faisant partie des minorités visibles dans plusieurs organisations ont stagné ou diminué au cours des dernières années. Au CST, la sous-représentation des personnes faisant partie des minorités visibles a tendance à s'accroître Note de bas de page 205 . D'après une analyse en dotation effectuée par le BCP, les mesures de dotation pour ce groupe ont diminué de 15 % depuis 2014-2015 Note de bas de page 206 . À Sécurité publique Canada, la représentation des membres faisant partie de minorités visibles n'a pas augmenté depuis 2012 Note de bas de page 207 . En 2018, la Commission canadienne des droits de la personne a indiqué que les efforts des FAC pour faire augmenter la représentation des personnes faisant partie des minorités visibles [traduction] « ne seraient pas suffisants pour tenir le rythme de la croissance du nombre de citoyens canadiens faisant partie de ce groupe Note de bas de page 208 . »
D'après des articles et des documents récents fournis au Comité, les personnes faisant partie des minorités visibles continuent de se heurter à des obstacles comportementaux. Les FAC, le SCRS et la GRC ont fait face à des allégations de racisme dans les dernières an nées Note de bas de page 209 . Des obstacles comportementaux plus subtils ont aussi été relevés à l'ASFC, au MDN et à AMC, notamment celui voulant que les personnes faisant partie des minorités visibles ne se sentent pas représentées aux échelons supérieurs de l'organisation ni écoutées par les dirigeants et, que selon l'examen des systèmes d'emploi du MDN, qu'elles ne se sentent pas en mesure de [traduction] « s'exprimer selon leur ethnie et leur culture au travail Note de bas de page 210 . »
L'évaluation du Comité des efforts des organisations pour favoriser l'inclusion
101. Le Comité croit qu'une caractéristique essentielle d'un milieu de travail inclusif est l'absence de harcèlement, de violence et de discrimination. Il est impossible de trop insister sur l'importance de ces problèmes. Le rythme lent des progrès à éliminer le harcèlement, la violence et la discrimination au sein des FAC et de la GRC préoccupe grandement. De plus, bien que des organisations de l'appareil de la sécurité et du renseignement aie nt mis en œuvre des politiques, de la formation et des campagnes de sensibilisation contre le harcèlement, beaucoup d'entre elles ont encore une compréhension limitée de la prévalence du harcèlement et des sources de harcèlement dans leur milieu. La question de la discrimination, quant à elle, reçoit beaucoup moins d'attention de la part de toutes les organisations. En outre, la mobilisation des employés sur les questions de diversité et d'inclusion diffère selon les organisations, ce qui pourrait nuire aux efforts généraux en vue de favoriser l'inclusion dans l'ensemble de ces organisations. Enfin, selon le Comité, il faut se pencher davantage sur les questions de sous-représentation et sur les allégations de discrimination à l'endroit des personnes faisant partie des minorités visibles dans l'appareil de la sécurité et du renseignement. La nécessité d'une plus grande diversité du point de vue opérationnel ainsi que les changements démographiques croissants portent le Comité à croire que les questions touchant les membres des groupes désignés requièrent une attention supplémentaire.