Chapitre 2 : La réponse du gouvernement a l'ingérence étrangère — Conclusion
Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement : Rapport annuel 2019

Conclusion

293. L'ingérence étrangère constitue une menace considérable pour la société et les institutions fondamentales du Canada. Toutefois, jusqu'aux dernières années, l'ingérence étrangère était principalement considérée être du ressort des organisations de la sécurité et du renseignement. Cependant, deux états ont fait grandement ressortir la menace : la Fédération de Russie, au moyen de ses cyberefforts pour saper l'élection présidentielle américaine et d'autres processus démocratiques ailleurs sur la planète, et la RPC, au moyen de sa stratégie diversifiée pour faire secrètement avancer ses intérêts dans plusieurs pays, le plus publiquement en Australie et en Nouvelle-Zélande. Le gouvernement du Canada commence à s'attaquer à la question, mais dans le cadre plus large des « activités des états hostiles ».

294. Il y a du travail à faire. L'examen qu'a réalisé le Comité montre que, pendant des années, le SCRS a mené des enquêtes et rédigé des rapports sur la menace que représente l'ingérence étrangère de nombreux états. Le SCRS estime que le Canada est [traduction] « une cible attrayante et permissive Note de bas de page 258  ». La nouvelle vision du gouvernement en est à ses débuts et n'a pas encore beaucoup changé le contexte. La mobilisation des paliers de gouvernement infranationaux est superficielle ou limitée par des défis institutionnels. La sensibilisation du public est presque inexistante, à l'exception des récents efforts de la part du directeur du SCRS. Les organisations de l'appareil de la sécurité et du renseignement ne s'accordent pas sur la définition du problème et la compréhension de sa gravité et de sa prévalence. Les réactions à l'ingérence étrangère demeurent ponctuelles et selon le cas, et ne sont que rarement envisagées dans un contexte élargi. La réponse est habituellement dirigée par une seule organisation et les outils qu'elle utilise sont le plus souvent de type diplomatique. Bien entendu, cette façon de faire accorde généralement une plus grande importance aux considérations de politique étrangère qu'aux risques nationaux à plus long terme, qui sont souvent difficiles à présenter clairement comme ayant des effets dommageables concrets. De plus, aucune organisation ne représente les intérêts à long terme de la souveraineté du Canada et de ses valeurs fondamentales.

295. Le gouvernement doit s'améliorer. La sécurité à long terme du Canada dépend de l'intégrité de sa souveraineté en matière de prise de décision, des institutions fondamentales solides et indépendantes et de la protection des droits et libertés des Canadiens. Le gouvernement doit adopter une approche reposant sur un calcul perfectionné des intérêts collectifs et, plus important, un accent continu sur les valeurs de la démocratie libérale du Canada. Dans ce contexte, le Comité partage l'opinion qui suit :

[traduction] Nous ne pouvons pas tenir les valeurs démocratiques pour acquises. Nous ne devons pas relâcher notre vigilance et penser que nos démocraties de longue date sont à l'abri de l'ingérence étrangère. L'ouverture de nos sociétés nous rend vulnérables, mais elle représente une composante essentielle de la démocratie qui contribue à notre résilience et ne peut être compromise Note de bas de page 259 .

La menace est réelle, malgré qu'elle soit souvent cachée. Si nous ne prenons pas de mesures exhaustives et pangouvernementales contre l'ingérence étrangère, elle fragilisera lentement les bases de nos institutions fondamentales, y compris notre système démocratique en soi. Le Comité s'attend à ce que son examen et ses recommandations soulignent les endroits importants où prendre des mesures.