Chapitre 4 : Activités liées a la sécurité nationale et au renseignement
Programmes de sécurité a l'échelle internationale
Rapport spécial sur les activités d’Affaires mondiales Canada en matière de sécurité nationale et de renseignement
Programmes de sécurité a l'échelle internationale
136. Le gouvernement reconnaît depuis longtemps que la sécurité nationale du Canada est inévitablement liée à la stabilité mondiale. La politique de 2004 en matière de sécurité nationale, intitulée Protéger une société ouverte : la politique canadienne de sécurité nationale, fait état des trois intérêts centraux du gouvernement en matière de sécurité nationale : protéger les Canadiens au pays comme à l'étranger; éviter que le Canada ne soit l'hôte de menaces pouvant se diriger contre ses alliés; et prendre part à la sécurisation de l'espace international. Pour arriver à protéger ces intérêts, le gouvernement s'est engagé à être proactif à l'endroit des menaces, de sorte à éviter qu'elles n'atteignent le territoire national. Pour ce faire, le gouvernement cherche à accroître la stabilité dans les États fragilisés, à prévenir la prolifération des armes de destruction massive et à renforcer la capacité des États à combattre le terrorisme et la criminalité309.
137. Depuis le début des années 2000, le Secteur de la sécurité internationale et des affaires politiques du Ministère a établi trois programmes clés axés sur la stabilisation et le développement des capacités. Les programmes prévoient d'abord le financement de projets à l'étranger, grâce à des subventions et à des contributions. Le plus vaste des trois, en l'occurrence, est le Programme pour la stabilisation et les opérations de paix. Il fonctionne moyennant un budget annuel de 150 M$ et a pour mandat de réaliser, à l'étranger, des projets de prévention des conflits, de stabilisation et de consolidation de la paix310. Pour sa part, le Programme de réduction de la menace liée aux armes fonctionne moyennant un budget annuel de 73,4 M$ et exerce un mandat qui se concentre sur la lutte contre les menaces liées à la prolifération des armes chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires, et le terrorisme. Le Programme d'aide au renforcement des capacités antiterroristes et le Programme d'aide au renforcement des capacités de lutte contre la criminalité (ci-après désignés respectivement par les termes « Programme de lutte contre le terrorisme » et « Programme de lutte contre la criminalité ») fonctionnent grâce à un budget annuel combiné de 64,5 M$ et exercent des mandats visant à renforcer la capacité de certains États de répondre efficacement aux menaces posées par le terrorisme ou par le crime grave organisé. De plus amples détails sur les pouvoirs du Ministère de même que sur les activités et la gouvernance sont abordés plus loin, pour chacun des programmes.
Programme pour la stabilisation et les opérations de paix
Contexte et pouvoirs
138. Le Programme pour la stabilisation et les opérations de paix (PSOPs) constitue la principale plateforme du gouvernement pour la prévention des conflits, la stabilisation et la consolidation de la paix à l'étranger. Les origines du programme remontent à 2005, soit à la création du Groupe de travail sur la stabilisation et la reconstruction (GTSR), lequel avait été mis sur pied pour combler un écart entre, d'une part, les efforts immédiats sur le plan de l'aide humanitaire et, d'autre part, le développement à long terme et les intérêts des États fragilisés en matière de sécurité.311 Le programme comportait des mécanismes permanents de surveillance des crises à l'étranger et de prestation de programmes se fondant sur les connaissances et les capacités d'autres ministères fédéraux. À la suite d'une évaluation exhaustive du programme réalisée de 2010 à 2015, le Ministère a remplacé le GTSR par le PSOPs, en 2016, mais en a réduit le mandat de sorte que désormais, celui-ci se concentrât exclusivement sur la paix et la sécurité dans les États fragilisés et touchés par les conflits, établissant ainsi un nouveau cadre de mesure de rendement et développant une multiplicité de ressources visant à réduire les pertes de la mémoire institutionnelle312. En 2018, le PSOPs a obtenu des autorisations permanentes et a mis à jour son cadre de référence. Le PSOPs s'est ensuite concentré plus avant sur sa stratégie de 2019-2020, en établissant une liste des pays prioritaires envers lesquels il convenait de s'engager intégralement, d'investir des efforts ciblés et de prévenir les conflits313.
139. L'autorisation légale du Ministère à l'égard du PSOPs est le corollaire de la prérogative de la Couronne. Le paragraphe 10(3) de la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (Loi sur le MAECD) ajoute que cette autorité sert, notamment, à « élaborer et mettre en œuvre des programmes relevant de ses attributions en vue de favoriser les intérêts du Canada à l'étranger »314. Comme pour tous les programmes, en ce qui a trait au PSOPs, le Ministère tire son autorité stratégique d'approbations du Cabinet315. Quant à ses autorisations de financement, elles découlent de décisions de financement prises par le Conseil du Trésor316.
Mandat et activités
140. Le PSOPs a notamment pour mandat de contribuer au renforcement de la paix, de la sécurité et de la stabilité pour les États fragilisés et touchés par les conflits. En considération de ce mandat, le programme exerce à la fois une fonction stratégique et une fonction programmatique317. La fonction stratégique consiste à agir en tant que chef de file sur le plan des efforts que le gouvernement investit pour la paix et la stabilisation, notamment en coordonnant la réaction du gouvernement aux crises politiques à l'étranger. De plus, le PSOPs prodigue des conseils stratégiques sur le plan des engagements envers les États fragilisés et touchés par les conflits, et ce, à l'intention des missions, des bureaux géographiques et d'autres ministères; dirige la mise en œuvre du Programme mondial sur les femmes, la paix et la sécurité du gouvernement; et élabore les politiques du gouvernement sur les opérations de paix.315
141. La fonction programmatique du PSOPs sert notamment à soutenir les efforts de paix et de sécurité en finançant des projets et en favorisant le déploiement d'experts du gouvernement319. Les activités admissibles au titre du programme du PSOPs comprennent la prestation de conseils et d'assistance techniques, les programmes de formation, la fourniture d'équipements et de services, et la prestation d'une aide d'urgence320. Le PSOPs distribue annuellement plus de 110 M$ en subventions et en contributions aux zones géographiques et aux enjeux prioritaires321. Entre 2016 et 2021, le PSOPs a soutenu plus de 250 projets moyennant environ 1 M$ par projet322. En outre, le PSOPs finance des projets mis en œuvre par des organisations multilatérales, par exemple, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), ou par des organismes de taille plus modeste, comme Avocats sans frontière. Il soutient des projets comme le Fonds de stabilisation pour la Libye, du PNUD, et le Fonds d'affectation spécial pour l'Armée nationale afghane, de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN). Par ailleurs, le programme affecte des policiers et des experts civils canadiens à l'étranger ainsi que dans des organisations internationales323. En 2018-2019, le PSOPs a coordonné le déploiement de policiers canadiens dans des missions bilatérales ou des opérations de maintien de la paix ou de soutien à la paix, notamment en Haïti, en Ukraine et au Mali, alors que 17 experts civils ont été appelés à soutenir des efforts de stabilisation alliés en Syrie et en Afghanistan.324
Gouvernance
142. La structure de gouvernance qui encadre les activités du PSOPs comprend des politiques, des procédures, des comités de surveillance et des mécanismes réguliers de surveillance et d'examen du programme. Quant aux modalités, qui établissent la politique centrale et les procédures, elles font état des objectifs du programme, des critères d'admissibilité des projets et des prestataires du financement, ainsi que des montants maximaux fixés pour les dépenses du programme325. En outre, le document décrit le processus d'approbation des projets, de même que les exigences visant la production des rapports sur les finances et le rendement326. Compte tenu des risques liés aux environnements dans lesquels les projets financés par le PSOPs sont mis en œuvre, le programme a aussi élaboré un cadre d'évaluation du risque assorti d'un guide, grâce auquel il est possible d'évaluer chacune des propositions de projets sous l'angle de la réputation ou des risques sur le plan de la sécurité327.
143. Trois conseils distincts assurent l'encadrement des activités du PSOPs. Le conseil consultatif du PSOPs est un forum interministériel tenu au niveau des directeurs généraux, dont la tâche est, notamment, de tenir des consultations et de fournir de la rétroaction relativement à la politique, à la programmation et aux priorités du PSOPs; mais aussi de discuter des objectifs en matière de politique stratégique328. Pour sa part, le conseil des politiques du PSOPs se penche sur les enjeux relatifs à la stratégie, à la politique, à l'élaboration et à la planification s'appliquant à l'ensemble du programme. Puis, l'équipe de responsabilisation dans le cadre du PSOPs donne son aval aux projets et confirme que ceux-ci s'alignent bel et bien sur le mandat et les priorités du PSOPs.
144. Les activités du PSOPs sont évaluées en considération d'un cadre complet de mesure du rendement, et sont l'objet d'évaluations et d'audits périodiques. Le programme est lui-même assujetti à la Politique sur les résultats du Conseil du Trésor, laquelle exige que les ministères préparent des profils d'information sur le rendement, qui donnent le détail des objectifs, des résultats escomptés et des indicateurs de rendement du programme329. Le PSOPs a créé son plus récent profil d'information en mars 2019.330 En vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, le Ministère est légalement tenu de procéder à l'examen des programmes permanents tous les cinq ans331. Au reste, le PSOPs a subi un examen de l'état de progression en octobre 2018, et une évaluation formelle du programme devrait être achevée en 2024332. De plus, le programme fait annuellement rapport sur les activités et les résultats, y compris sur les résultats obtenus en matière de direction et de mobilisation sur le plan stratégique, en matière de programmation, et sur le plan du résultat des déploiements. Les activités du PSOPs sont détaillées dans le rapport annuel sur les résultats ministériels d'AMC333.
Programme de réduction de la menace liée aux armes
Contexte et pouvoirs
145. Le Programme de réduction de la menace liée aux armes constitue l'apport du Canada au Partenariat mondial contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes (le Partenariat mondial) du G7 334. En 2002, les dirigeants réunis au sommet du G8 de l'époque ont établi un Partenariat mondial du G8, une initiative s'étendant sur dix ans et permettant l'analyse de la menace posée par les armes de destruction massive pour les acteurs non étatiques ainsi que l'observation des États qui pourraient contribuer à la prolifération335. À l'origine, l'initiative s'intéressait surtout à la Russie et aux États de l'ex-Union soviétique. Or, les dirigeants du G8 en ont élargi le mandat — à l'occasion d'un sommet tenu en 2011 — de sorte que l'initiative s'intéresse désormais à tous les États qui disposent d'armes de destruction massive àu de matériel connexe, mais qui n'ont pas les moyens de les tenir en sûreté336. En 2018, le Partenariat mondial a étendu son mandat, cette fois pour soutenir les régimes entourant les armes conventionnelles : le Traité sur le commerce des armes et la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnelles337.
146. L'autorisation légale du Ministère pour ce programme est le corollaire de la prérogative de la Couronne. Le paragraphe 10(3) de la Loi sur le MAECD ajoute que cette autorité sert, notamment, à « élaborer et mettre en œuvre des programmes relevant de ses attributions en vue de favoriser les intérêts du Canada à l'étranger »338. Pour ce qui a trait à ce programme, le Ministère tire son autorité stratégique d'un certain nombre d'approbations du Cabinet, notamment celle de juin 2009, celle de mars 2012 et celle de décembre 2016 339. Or, ses autorisations de financement découlent de deux approbations du Conseil du Trésor datant de février 2011 et de janvier 2018340.
Mandat et activités
147. Le mandat du programme est de réduire la menace posée par la prolifération et l'utilisation des armes de destruction massive ainsi que de certaines armes conventionnelles. Le programme exerce son mandat par le financement de projets conçus pour atténuer les menaces posées par les armes de destruction massive et pour renforcer les régimes internationaux de non-prolifération. La Division du Programme de réduction de la menace liée aux armes d'AMC gère la programmation touchant à cinq sphères prioritaires, à savoir les évaluations nucléaires et radiologiques; la sécurité biologique; les armes chimiques; les armes conventionnelles; ainsi que la résolution 1540 du Conseil de sécurité de l'ONU, laquelle a pour objet d'empêcher les acteurs non étatiques de faire l'acquisition d'armes de destruction massive341.
148. De concert avec des partenaires nationaux, des alliés et des organisations internationales, le programme finance des projets visant une multiplicité d'enjeux. Les projets financés doivent être l'objet d'examens, envisager la prestation de formations ou d'assistance technique, prévoir des améliorations sur le plan de l'infrastructure et mener des activités de mobilisation contre les menaces de la prolifération342. Entre 2015 et 2021, le programme a financé plus de 220 projets, pour un coût moyen d'environ 650 00 $ par projet. Les initiatives qui ont reçu du financement pendant la période visée par le présent examen comprennent les activités de surveillance et de vérification du nucléaire en Corée du Nord ainsi que la recherche et le développement de vaccins contre la COVID-19343. Le programme collabore avec des partenaires nationaux et internationaux, notamment l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et le département de l'énergie des É.-U., de même qu'avec des organisations internationales comme l'Agence internationale de l'énergie atomique 344.
Gouvernance
149. La structure de gouvernance qui encadre les activités du programme comprend des politiques, des procédures et des mécanismes réguliers de surveillance et d'examen du programme. D'ailleurs, c'est en considération des modalités que sont établies les politiques et les procédures du programme 345. C'est également dans le mandat que sont décrits les objectifs et les indicateurs de rendement du programme, les critères d'admissibilité des projets et des prestataires du financement, ainsi que les détails relatifs aux dépenses346. Entre autres, le document décrit les processus s'appliquant à la proposition, à l'évaluation et à l'approbation des projets, et il énonce les exigences visant la production de rapports par les organisations prestataires, ce qui comprend les exigences concernant les rapports d'étapes et les rapports finaux portant sur la mise en œuvre desdits projets 347. Par ailleurs, d'autres documents présentent le détail des rôles et des responsabilités que doivent tenir les dirigeants de projets, les prestataires du financement et les hauts gestionnaires au fil des phases d'examen, d'approbation, de mise en œuvre et de clôture des propositions de projets 348.
150. Les priorités en matière de programme sont périodiquement examinées au niveau national et dans le cadre de l'initiative globale du G7. Le Groupe de travail sur le Partenariat mondial se réunit deux fois par année pour évaluer les menaces que posent les armes de destruction massive et pourétablir les priorités du programme349. Le Canada a coprésidé plusieurs groupes de travail au cours de sa participation au sein du Partenariat mondial, notamment le groupe de travail sur la sécurité chimique, en 2016, et le groupe de travail sur la sécurité biologique, en 2018.350 En outre, le programme réalise des exercices annuels d'examen permettant de valider, voire de mettre à jour les priorités de son programme. Aux fins de cet examen, le programme consulte les intervenants concernés d'AMC ainsi que les intervenants d'autres ministères, notamment le MDN/FAC, l'ASFC, la GRC, l'Agence de la santé publique du Canada et Ressources naturelles Canada 351. Le programme a formalisé et renforcé son processus d'établissement des priorités en 2018, faisant ainsi suite à des recommandations issues d'une évaluation de programme réalisée en interne 352. Suivant les obligations du Ministère énoncées dans la Loi sur la gestion des finances publiques, le programme doit se soumettre périodiquement à des évaluations et à des audits internes, les derniers ayant eu lieu en 2017.353 Les activités du programme et les résultats de la programmation sont également compris dans le plan ministériel ainsi que dans le rapport annuel sur les résultats ministériels d'AMC354.
Programmes d'aide au renforcement des capacités de lutte centre la criminalité et antiterroristes
Contexte et pouvoirs
151. Les programmes d'aide au renforcement des capacités de lutte contre la criminalité et antiterroristes ont été créés suite au constat que la criminalité organisée et le terrorisme à l'échelle internationale constituaient une menace pour la sécurité nationale et la prospérité des Canadiens. Le Programme d'aide au renforcement des capacités antiterroristes (PARCA) a été établi en 2005, au titre de la politique gouvernementale de 2004 sur la sécurité nationale intitulée Protéger une société ouverte : la politique canadienne de sécurité nationale. Le gouvernement a confié au PARCA le mandat général de fqurnir une assistance aux États qui cherchent à se doter de capacités de lutte contre le terrorisme 355. En 201O et 2016, dans le cadre de la stratégie pour le Moyen-Orient, le gouvernement s'est servi de l'enveloppe réservée au Sahel pour accorder un financement additionnel à des activités du programme menées dans la région africaine du Sahel, mais aussi au Moyen-Orient et en Afrique du Nord356. Pour sa part, le Programme d'aide au renforcement des capacités de lutte contre la criminalité (PARCLC) a été établi en 2009 en réaction aux menaces que les activités criminelles posent pour la sécurité régionale, nationale et internationale. Il se concentre sur les activités programmatiques menées dans les Amériques 357. Par ailleurs, c'est au titre du PARCLC que le gouvernement a consenti, en 2012, des fonds additionnels visant à soutenir les efforts de prévention et d'intervention à l'égard du trafic de personnes à destination du Canada.
152. L'autorisation légale du Ministère pour ce programme est le corollaire de la prérogative de la Couronne. Le paragraphe 10(3) de la Loi sur le MAECD ajoute que cette autorité sert, notamment, à « élaborer et mettre en œuvre des programmes relevant de ses attributions en vue de favoriser les intérêts du Canada à l'étranger »358. Comme pour tous les programmes, en ce qui a trait à ces deux programmes, le Ministère tire son autorité stratégique d'approbations du Cabinet signifiées. Quant à ses autorisations de financement, elles découlent de décisions de financement prises par le Conseil du Trésor.
Mandat et activités
153. Le groupe de la criminalité internationale et du terrorisme d'AMC gère les programmes de lutte contre le terrorisme et la criminalité. Dans l'absolu, les programmes ont pour objet d'outiller les États dont les ressources et l'expertise sont insuffisantes pour faire face au crime organisé ou au terrorisme. Du coup, les programmes cherchent également à accroître la sécurité des Canadiens et des intérêts du Canada. Les deux programmes financent des projets de concert avec les partenaires nationaux et internationaux. Ces programmes tentent d'atteindre leurs objectifs par le financement de projets d'aide au renforcement des capacités à l'étranger, en coordination avec des partenaires nationaux et internationaux, notamment des ministères fédéraux et des organisations non gouvernementales359.
154. Le PARCA mise sur un budget annuel de 21 M$ 360. Son mandat consiste à prêter assistance aux États qui cherchent à se doter d'outils leur permettant de prévenir le terrorisme (sinon d'y répondre) grâce à la prestation de formations, à l'acquisition d'équipement, au financement ainsi qu'à une aide technique et juridique 361. Le programme offre de l'assistance pour des enjeux que l'on répartit dans six sphères : la sécurité des frontières, des transports et des infrastructures essentielles; l'assistance juridique; l'exécution de la loi, la sécurité, l'armée et le renseignement; le financement du terrorisme; la lutte contre l'extrémisme violent et les combattants terroristes étrangers; et la lutte contre les engins explosifs improvisés 362. Entre 2015 et 2020, le PARCA a financé plus de 130 projets, pour un coût moyen de 500 000 $ par projet363. La mise en œuvre a été possible grâce à la participation de partenaires comme le MDN/FAC, ***, la GRC, INTERPOL, le Bureau de lutte contre le terrorisme de l'ONU, et la Banque mondiale. Parmi les exemples de projets menés par le PARCA, citons la formation sur le renseignement dans les sources ouvertes *** ou encore le programme de lutte contre l'extrémisme violent ***, qui a été mis sur pied en collaboration avec l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture 364.
155. Le PARCLC fonctionne grâce à un budget annuel de 26 M$ 365. Le programme fournit de l'assistance dans six grands domaines : les drogues illicites; la corruption; le trafic de personnes et l'immigration illégale; le blanchiment d'argent; la réforme du système de sécurité; et la prévention de la criminalité (y compris la cybercriminalité)366. La programmation se concentre surtout sur les projets réalisés dans la zone des Amériques et — grâce aux fonds de l'enveloppe consacrée à l'immigration illégale — en Asie du Sud-Est et en Afrique de l'Ouest. L'enveloppe comprend 14 M$ pour l'ensemble du programme, 8,5 M$ pour l'immigration illégale, et une somme additionnelle de 3,5 M$ affectée aux contributions à l'Organisation des États américains et à l'Office des Nations Unies contre la drogue et Je crime. Parmi les exemples de projets menés par le PARCLC, citons la formation sur la gestion du renseignement et des opérations préparant à la lutte contre l'immigration illégale en Asie *** ainsi que le Renforcement des capacités des organismes d'exécution de la loi de l'Afrique de l'Ouest en matière de prévention du trafic de personnes, réalisé en collaboration avec INTERPOL.367
Gouvernance
156. La structure de gouvernance des programmes de lutte contre le terrorisme et la criminalité consiste en une série de procédures et de mécanismes de supervision, de surveillance et d'évaluation. Le document énonçant les modalités du programme fait office, en quelque sorte, de guide principal. Il énonce les objectifs du programme, les résultats escomptés de même que les indicateurs de rendement. De plus, il décritles types de projets qu'il convient de financer ainsi que les sommes maximales qu'il convient de verser annuellement à chacun des projets. 368 Enfin, il fait état des processus de demande et d'examen visant les projets ainsi que des exigences en matière de production de rapports369. En outre, les modalités indiquent que les projets sont évalués en fonction de leur admissibilité, laquelle fait fond sur les modalités et la complexité du projet, sur les risques et sur le pourcentage de la contribution financière du Canada.
157. La gouvernance des programmes repose sur une structure de comités à deux niveaux, qui offre une orientation stratégique et une surveillance des projets. Le premier niveau consiste en un comité directeur formé de directeurs généraux et présidé par AMC. Ce comité fournit des directives stratégiques, veille à ce que les programmes s'alignent sur les priorités du gouvernement en matière de lutte contre le terrorisme et la criminalité, et il examine le rendement annuel desdits programmes. Le second niveau se compose des comités d'examen — l'un pour le PARCA, l'autre pour le PARCLC — et appuie le comité directeur des directeurs généraux. Ces comités d'examen se concentrent sur les enjeux opérationnels ayant trait à la mise en œuvre et au déroulement des deux programmes. Ils sont également chargés d'examiner et, le cas échéant, d'approuver les propositions de projets. Le comité directeur compte des directeurs généraux qui représentent toutes les organisations fédérales exerçant un mandat de lutte contre la criminalité internationale et le terrorisme, à savoir le SCRS, l'ASFC, la GRC et le MDN/FAC, tandis que les comités d'examen se composent de directeurs et d'agents sur le terrain issus des mêmes organisations 370.
158. Les programmes sont régulièrement l'objet d'examens. Par ailleurs, ils tiennent un exercice annuel d'établissement des priorités en collaboration avec les partenaires du gouvernement, ce qui permet de veiller à ce que les activités s'alignent sur les politiques, les pratiques et les intérêts du Canada en matière de sécurité nationale et de politique étrangère. Pendant cet exercice, les représentants du programme consultent les intervenants issus du Ministère et de l'ensemble du gouvernement pour établir les priorités des trois années suivantes. Ces priorités sont évaluées en fonction de plusieurs éléments, à savoir les priorités stratégiques déjà établies en matière de politique étrangère, les menaces et les risques pour les intérêts du Canada, la mesure dans laquelle les programmes de renforcement des capacités permettent d'affronter les menaces, l'aptitude à se coordonner avec les principaux alliés, et l'aptitude de l'État prestataire à mettre en pratique un programme de renforcement des capacités. 371 Les programmes sont tenus de suivre la politique du Conseil du Trésor sur les résultats et ont élaboré leur plus récent profil d'information sur le rendement en mars 2022. 372 De plus, les programmes doivent se soumettre régulièrement à des évaluations et audits internes, la plus récente a eu lieu en 2016.373
Étude de cas : Le projet de réfection d'une route en Jordanie
159. Pour illustrer les activités de programme du Ministère en matière de sécurité internationale, le Comité s'est attardé au projet de réfection d'une route en Jordanie du PARCA. Réalisé entre 2016 et 2020, ce projet porte sur la réfection et la construction d'une route le long de la frontière que la Jordanie partage, dans le nord-ouest, avec la Syrie. Cette route devait servir, notamment, à renforcer la sécurité frontalière dans la région et à soutenir la lutte contre le terrorisme374. Le projet était d'intérêt pour le Comité en raison de son coût, de sa complexité et de sa conformité aux priorités globales en matière de sécurité frontalière, de politique étrangère et de défense.
160. En février 2016, des représentants d'AMC et du MDN/FAC se sont rendus en Jordanie pour recenser les occasions de renforcement des capacités pouvant favoriser la stratégie gouvernementale pour le Moyen-Orient et l'opération impact des FAC375. Pendant ce voyage, les représentants ont pris acte de la porosité de la frontière entre la Jordanie et la Syrie, et ont co.nclu que l'état de cette frontière pouvait constituer une menace pour la sécurité et la stabilité dans cette région. En juillet 2016, les forces armées jordaniennes ont formellement demandé au Canada de prendre part au projet de réfection d'un tronçon de route d'environ 60 km longeant sa frontière nord-ouest, en faisant valoir les difficultés causées par la contrebande d'origine terroriste dans ladite région.376 Après avoir brièvement analysé ses·propres autorisations et ses propres capacités techniques en considération de la demande soumise par la Jordanie; le MDN/FAC a consulté AMC et les ministères ont convenu, en juin 2017, qu'AMC assurerait la gestion et la mise en œuvre du projet au nom du MDN/FAC, compte tenu des autorisations de programme et de l'expérience d'AMC dans la réalisation de projets de cette nature et de cette ampleur.377
161. En août 2017, le gouvernement a octroyé au MDN/FAC l'autorité stratégique pour ce qui a trait aux projets de renforcement des capacités en Jordanie, au Liban et en Irak, sous l'égide de l'opération impact. Cependant, l'autorisation de programme permettant la mise en œuvre de projets de cette nature relevait d'AMC, conformément aux lignes directrices et aux règlements établis par le Conseil du Trésor. Trois mois plus tard,le premier ministre approuvait l'affectation, par le MDN/FAC, du financement de l'opération impact pour les projets de renforcement des capacités, pour peu que ce projets soient mis en œuvre en étroite collaboration avec AMC. En juillet 2018, AMC et le MDN ont signé un protocole d'entente devant régir la mise en œuvre collaborative des projets de renforcement des capacités dans la région. Le MDN devait alors transférer la somme de 54,2 M$ à AMC pour le renforcement des capacités sous les auspices de l'opération impact, y compris pour la réfection de la route en Jordanie, en échange de laquelle AMC assumait la gestion de ces projets par l'intermédiaire du PARCLC. Le coût particulièrement élevé du projet de route en Jordanie — environ 18 M$ — a nécessité une augmentation de la limite budgétaire enregistrée dans les modalités du programme, augmentation que la ministre des Affaires étrangères a approuvée en septembre 2018378.
162. Géré par le programme, le projet a été soumis à de rigoureux processus d'examen et d'approbation. En octobre 2018, le MDN/FAC et le Bureau des Nations Unies pour les services d'appui aux projets ont déposé leur proposition de projet 379. Pendant les deux mois suivants, le comité d'examen du programme s'est affairé à garantir la valeur stratégiqué globale du projet de même que sa conformité aux principes de viabilité et aux considérations sur l'égalité des sexes s'appliquant aux programmes de renforcement des capacités.380 Les représentants du programme ont également soutenu l'élaboration d'un cadre exhaustif pour la mesure du rendement et la gestion responsable.des projets. Le comité d'examen a finalement approuvé le projet en novembre, et celui-ci a reçu l'aval de la ministre des Affaires,étrangères deux mois plus tard.
163. Le projet de réfection de la route frontalière a duré de février 2019 à juillet 2020. La mise en œuvre a nécessité une étroite coordination entre les partenaires nationaux et internationaux. Les représentants du programme à Ottawa ont géré le projet en concertation avec le Bureau des Nations Unies pour les services d'appui aux projets qui; de son côté, a produit des rapports mensuels sur la progression des travaux de construction routière. C'est le personnel de mission d'AMC en Jordanie qui a facilité les discussions entre le représentant à Ottawa, les interlocuteurs de la Jordanie et les partenaires de l'ONU.381 Dans l'intervalle, les membres des FAC postés en Jordanie se sont chargés des relations avec les forces armées jordaniennes et ont réussi àfaciliter l'accès à la.zone entourant la route, à résoudre leurs points de préoccupation concernant la mise en œuvre du projet et à fournir à AMC des mises à jour additionnèlles sur l'état des travaux 382. La route a été construite dans le respect des limites budgétaires, et les représentants du programme n'ont signalé aucune difficulté importante pour l'ensemble de la mise en œuvre.
164. Fondée sur de bonnes capacités de reconnaissance et de mise en œuvre, la réussite du projet montre la olidité de la gouvernance du programme et son aptitude à répondre aux priorités sur le plan de la politique étrangère, de la sécurité et de la défense. De plus, le fait que le MDN/FAC reconnaisse la compétence et l'autorité d'AMC en matière de programmation et de renforcement des capacités a permis une répartition optimale des tâches de financement, de gestion et de mise en œuvre du projet. Établi de longue date, le mécanisme de gouvernance a favorisé, d'une part, l'évaluation rigoureuse de la valeur stratégique du projet ainsi que l'alignement sur les principes de renforcement des capacités, et, d'autre part, le développement de solides mécanismes de responsabilisation et de mesure du rendement. De l'étape de la reconnaissance jusqu'à celle de la conclusion des travaux, la collaboration exemplaire entre AMC et le MDN/FAC représente bien le degré de cohérence qu'il est possible d'atteindre entre la politique étrangère et la politique de défense, et montre que le programme est apte à soutenir les priorités globales en matière de politique étrangère, de sécurité et de défense.