Annexe A: Conclusions et recommandations du Rapport spécial sur l'ingérence étrangère dans les processus et les institutions démocratiques du Canada
Rapport annuel 2024

Conclusions

C1.

Des États étrangers ont recours à des mesures d'ingérence sophistiquées et omniprésentes qui ciblent particulièrement les processus et institutions démocratiques du Canada; qui sont employées avant, pendant et après les élections; et qui visent tous les ordres de gouvernement. Ces activités continuent de faire peser une menace considérable sur la sécurité nationale et l'intégrité globale de la démocratie du Canada. La RPC et l'Inde sont les États les plus actifs au chapitre de l'ingérence étrangère.

C2.

Le gouvernement savait en 2018 que les réformes mises en place dans le cadre du Plan pour protéger la démocratie ne suffisaient pas pour agir sur l'ingérence étrangère dans les processus et institutions démocratiques. Il n'a toujours pas mis en œuvre une intervention efficace contre l'ingérence étrangère dans les processus et institutions démocratiques, et ce, malgré la quantité importante de rapports de renseignement à sa disposition, les travaux stratégiques de base réalisés, les consultations publiques et les demandes à cette fin présentées par le Comité.

C3.

Des différences considérables persistent dans la façon dont les ministres, ministères et organismes du gouvernement interprètent la gravité et la fréquence de la menace, y compris le seuil de réponse.

  • L'appareil du renseignement a augmenté sa production de rapports destinés au gouvernement concernant la menace que pose l'ingérence étrangère envers les processus et institutions démocratiques du Canada, en fonction des priorités en matière de renseignement du Canada.
  • Les ministères responsables des politiques (Bureau du Conseil privé, Affaires mondiales Canada et Sécurité publique Canada) n'ont pas convenablement examiné les ensembles d'évaluations ou de rapports de renseignement et n'ont pas généré de conseils stratégiques pour agir sur des cas précis d'ingérence étrangère.
  • Les ministres responsables de la sécurité nationale n'ont pas demandé de conseils stratégiques pour donner suite aux rapports de renseignement et le gouvernement a tardé à mettre en place des structures de surveillance chargées de se pencher sur les renseignements et de prendre des décisions.

C4.

Les rôles, les mandats et l'imputabilité du Conseil de la sécurité nationale et des comités de soutien chargés de la gouvernance ne sont pas clairs.

C5.

Le cadre juridique du Canada ne permet pas à l'appareil de la sécurité et du renseignement ou aux forces de l'ordre de répondre efficacement aux activités d'ingérence étrangère, ce qui nuit à la capacité du gouvernement fédéral de collaborer avec d'autres ordres de gouvernement et les forces de l'ordre, principalement en ce qui a trait à l'échange et à l'utilisation de renseignements classifiés, respectivement.

C6.

Alors que des ministères et organismes ont mené des opérations visant à perturber, voire à prévenir l'ingérence étrangère, les retombées concrètes en matière de réduction de la menace étaient difficiles à mesurer.

C7.

Le gouvernement n'a toujours pas adopté une approche efficace pour nouer le dialogue avec la population canadienne et d'autres ordres de gouvernement. Bien qu'il ait augmenté sa communication avec certains parlementaires, partis politiques et candidats aux élections, ses efforts ont été circonscrits dans le temps (c'est-à-dire axés sur les élections), ciblés de façon restrictive et souvent réactifs, et l'information fournie était trop générale. Il n'a pas réussi à mettre en œuvre une approche intégrale de communication avec les parlementaires fédéraux.

C8.

La capacité du gouvernement d'atténuer les vulnérabilités dans l'administration des partis politiques est limitée.

Recommandations

R1.

Le gouvernement dépose avant la prochaine élection fédérale un projet de loi visant à combler les lacunes du cadre juridique du Canada en matière d'ingérence étrangère. En l'occurrence, il s'agira précisément :

  1. de créer un registre pour la transparence en matière d'influence étrangère;
  2. de modifier le Code criminel et la Loi sur la protection de l'information de sorte à définir l'ingérence étrangère et à introduire les infractions pertinentes;
  3. de moderniser la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, notamment, en favorisant l'élargissement des échanges d'informations classifiées;
  4. de résoudre les difficultés liées au renseignement et à la preuve;
  5. d'atténuer les vulnérabilités observées dans les processus de mise en candidature, y compris les courses à la direction des partis.

R2.

Le gouvernement mobilise les partis politiques pour déterminer si les processus de mise en candidature et les courses à la direction des partis doivent être ajoutés au cadre de la Loi électorale du Canada et travaille avec le Parlement pour déterminer s'il faut réviser la l oi régissant le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique et le conseiller sénatorial en éthique afin d'y inclure l'ingérence étrangère.

R3.

Le gouvernement réexamine et renouvelle les lois, les stratégies et les modalités de financement pour veiller à ce qu'elles s'adaptent aux changements des activités d'ingérence étrangère et d'autres menaces envers la sécurité nationale. Le gouvernement introduit des dispositions de révision législative dans les lois sur la sécurité nationale et les respecte.

R4.

Le gouvernement s'assure que les rôles, les mandats et les imputabilités du Conseil de la sécurité nationale et des comités de soutien chargés de la gouvernance sont clairs et communiqués publiquement pour accroître la transparence et la performance.

R5.

L'appareil de la sécurité et du renseignement établit des définitions et des seuils d'intervention uniformes s'appliquant à l'ingérence étrangère, et les organisations chargées de la collecte de renseignements et celles responsables de fournir des conseils stratégiques collaborent régulièrement dans le but de fournir au gouvernement des évaluations de la menace qui sont opportunes et complètes, mais aussi des conseils en matière d'intervention respectivement.

R6.

Le gouvernement met immédiatement en place des séances d'information destinées aux parlementaires concernant la menace d'ingérence étrangère et en fait rapport annuellement.

État

Pour le Rapport annuel 2024, le gouvernement a répondu aux recommandations quatre et six.

De plus, le 3 juin 2024, le ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales a publié une déclaration dans laquelle il a convenu que tous les parlementaires doivent faire partie de la solution. Il a souligné le projet de loi C-70, Loi concernant la lutte contre l'ingérence étrangère, et le projet de loi C-65, Loi modifiant la Loi électorale du Canada, comme mesures positives pour lutter contre l'ingérence étrangère et protéger la démocratie et les institutions du Canada.

Réponse à R4 :

Le gouvernement a mis le mandat et la liste des membres du Conseil de la sécurité nationale à la disposition de tous les Canadiens, en ligne.

Un examen de la gouvernance en matière de sécurité nationale a été lancé pendant l'automne 2023, et la nouvelle structure de gouvernance a été mise en place tard en 2024.

Réponse à R6 :

En 2024, le SCRS a présenté des séances d'information conjointes sur l'ingérence étrangère à tous les caucus parlementaires de la Chambre des communes, avec le concours du CST/Centre canadien pour la cybersécurité (CCC), de SP et de la GRC.

Toujours en 2024, le CSNR a envoyé aux chefs de l'opposition une lettre les informant de son intention d'offrir des séances d'information fondées sur le renseignement afin de les aider à déterminer les positions de leur parti. Il s'agit d'une tâche courante.